Inconscient

1953 - Discours du Congrès de Rome et réponse aux interventions - Il ne s'agit pas de passer d'un étrange ics plongé dans l'obscur, à l'étage conscient, siège de la clarté, par je ne sais quel mystérieux ascenseur. C'est bien là l'objectivation, par quoi le sujet tente ordinairement d'éluder sa responsabilité, et c'est là aussi où les pourfendeurs habituels de l'intellectualisation, manifestent leur intelligence en l'en engageant plus encore. / Il s'agit en effet non pas de passage à la conscience, mais de passage à la parole, n'en déplaise à ceux qui s'obstinent à lui rester bouchés, et il faut que la parole soit entendue par quelqu'un là où elle ne pouvait même être lue par personne : message dont le chiffre est perdu ou le destinataire mort./ La lettre du message est ics l'important.

1953 - Fonction et champ de la parole… - 136 - [discours] L'ics est ce chapitre de mon histoire qui est marqué par un blanc ou occupé par un mensonge : c'est le chapitre censuré. Mais la vérité peut être retrouvée ; le plus souvent déjà elle est inscrite ailleurs. A savoir : - dans les monuments : et ceci est mon corps (...) où le symptôme hystérique montre la structure d'un langage et se déchiffre comme une inscription qui, une fois recueillie, peut sans perte grave être détruite ; - dans les documents d'archives aussi : et ce sont les souvenirs de mon enfance (...) ; - dans l'évolution sémantique : et ceci répond au stock et aux acceptions du vocabulaire qui m'est particulier (...) ; - dans les traditions aussi (...) qui sous une forme héroïsée, véhiculent mon histoire ; - dans les traces, enfin, qu'en conservent inévitablement les distorsions, nécessitées par le raccord du chapitre adultéré dans les chapitres qui l'encadrent - 139 - Ce que nous apprenons au sujet à reconnaître comme son ics, c'est son histoire, - cad que nous l'aidons à à parfaire l'historisation actuelle des faits qui ont déterminé déjà dans son existence - Mais s'ils ont eu ce rôle, c'est déjà en tant que faits d'histoire, cad en tant que reconnus dans un certain sens ou censurés dans un certain ordre. Ainsi toute fixation à un prétendu stade instinctuel est avant tout stigmate historique : page de honte qu'on oublie ou qu'on annule, ou page de gloire qui oblige. - Pour dire bref, les stades instinctuels sont déjà quand ils sont vécus, organisés en subjectivité. - subjectivité de l'enfant qui enregistre en victoires et en défaites le geste de l'éducation de ses sphincters, y jouissant de la sexualisation imaginaire de ses orifices cloacaux, faisant agression de ses expulsions excrémentielles, séduction de ses rétentions, et symboles de ses relâchements - 143 - [la télépathie montre bien que] l'ics du sujet soit le discours de l'autre - Coincidence des propos du sujet avec des faits dont il ne peut être informé, mais qui se meuvent toujours dans les liaisons d'une autre expérience où le psychanalyste est interloculeur - coïncidence aussi bien le plus souvent constituée par une convergence toute verbale, voire homonymique

1953 - Les écrits techniques de Freud - 100 - l'inconscient est le discours de l'autre . / Voilà un cas où c'est absolument manifeste. Il n'y a aucune espèce d'ics dans le sujet. C'est le discours de Mélanie Klein qui greffe brutalement sur l'inertie moïque initiale de l'enfant les premières symbolisations de la situation œdipienne.

1954/55 - Le moi dans la théorie de Freud - 245 - l'ics d'Œdipe, c'est bien ce discours fondamental qui fait que depuis longtemps, depuis toujours, l'histoire d' Œdipe est là écrite, que nous la connaissons, et qu'Œdipe l'ignore totalement, encore qu'il soit joué par elle depuis le début. - [Œdipe à Colone ] Vous y verriez que le dernier mot du rapport de l'homme à ce discours qu'il ne connaît pas, c'est la mort.

1955 - La Chose freudienne - 432 - dans cet ics (...) il [Freud] a reconnu l'instance des lois où se fondent l'alliance de la parenté, en y installant dès la Traumdeutung le complexe d'Œdipe comme sa motivation centrale. Et c'est ce qui me permet maintenant de vous dire pourquoi les motifs de l'ics se limitent (...) au désir sexuel. C'est essentiellement en effet sur la liaison sexuelle, et en l'ordonnant à la loi des alliances préférentielles et des relations interdites, que la première combinatoire des échanges de femmes entre les lignées nominales prend son appui -

1955/56 - Les psychoses - 127 - [l'ics] cette phrase, cette construction symbolique, recouvre de sa trame tout le vécu humain - 128 - Ce monologue soi-disant intérieur est en parfaite continuité avec le dialogue extérieur, et c'est bien pour cette raison que nous pouvons dire que l'ics est aussi le discours de l'autre. - la phrase évangélique ils ont des oreilles pour ne point entendre est à prendre au pied de la lettre. C'est une fonction du moi que nous n'avons pas perpétuellement à entendre cette articulation qui organise nos actions comme des actions parlées. - 129 - Dès lors, nous n'avons pas de raison de nous refuser de reconnaître ses voix [du psychotique : HALLUCINATION] au moment où le sujet nous en témoigne comme de quelque chose qui fait partie du texte même de son vécu. - 149 - le psychotique est un martyr de l'inconscient, en donnant au terme de martyr son sens, qui est celui d'être témoin. Il s'agit d'un témoignage ouvert. Le névrotique aussi est un témoin de l'existence de l'ics, il donne un témoignage couvert qu'il faut déchiffrer.

1957 - L'instance de la lettre dans l'inconscient - 522 - L'ics n'est ni le primordial, ni l'instinctuel, et d'élémentaire il ne connaît que les éléments du signifiant.

1957 - D'une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose - 548 - Ça pense plutôt mal, mais ça pense ferme : car c'est en ces termes qu'il [Freud] nous annonce l'ics -

1957 - La psychanalyse et son enseignement - 439 - L'ics est ce discours de l'Autre où le sujet reçoit, sous la forme inversée qui convient à la promesse, son propre message oublié.

1957/58 - Les formations de l'inconscient - 20/11/57 - ce n'est pas simplement le genre ou la classe particulière, mais même l'exemple particulier [individu] qui nous permet de saisir les propriétés les plus significatives [de l'ics]. - 08/01/58 - Il peut y avoir dans la chaîne des signifiants un signifiant ou une lettre qui manque - L'espace du signifiant, l'espace de l'ics est un espace typographique. - 25/06/58 - ce désir du sujet rencontré comme l'au-delà de la demande, est ce qui le fait opaque à notre demande, et ce qui aussi installe son propre discours comme quelque chose qui est absolument nécessaire à notre structure, mais qui nous est par certains côtés impénétrable, qui en fait un discours inconscient [1° car au-delà de la demande (consciente), 2° car c'est le désir de l'autre]

1958/59 - Le désir et son interprétation - 20/05/59 - le sujet y est intéressé [inter-esse entre deux signifiants au moins] - le sujet y est comme étant dans l'intervalle, comme étant ce qui est dans l'intervalle du discours de l'inconscient, comme étant à proprement parler la métonymie de cet être qui s'exprime dans la chaîne ics.

1961 - Maurice Merleau-Ponty - 251 - c'est l'inconscient dont je démontre le statut quand je m'emploie à y faire concevoir le sujet comme rejeté de la chaîne signifiante, qui du même coup se constitue comme refoulé primordial.

1959/60 - L'éthique de la psychanalyse - 247 - la raison, le discours, l'articulation signifiante comme telle, est là au départ, ab ovo , elle est là à l'état ics, avant la naissance de toute chose pour ce qui est de l'expérience humaine, elle est là enfouie, inconnue, non maîtrisée, non sue par celui-là même qui en est le support. - La prise de l'homme de l'ics a un caractère primitif, fondamental. Or ce champ, en tant qu'il est d'ores et déjà logiquement organisé, comporte une Spaltung , qui se maintient dans toute la suite du développement, et c'est par rapport à cette Spaltung que doit être articulé dans sa fonction le DÉSIR comme tel.

1960-61 - Le Transfert - 51 - Celui qui vient nous trouver, par principe de cette supposition qu'il ne sait pas ce qu'il a - déjà là est toute l'implication de l'inconscient, du il ne sait pas fondamental. C'est par là que s'établit le pont qui peut relier notre science nouvelle à toute la tradition du connais-toi toi-même [à ceci près, donc, que la formule socratique, avec la philosophie, sous-entend la connaissance (et forcément aussi l'inconnaissance) de L'ÊTRE alors que l'analytique parle du non savoir de l'AVOIR (du non s'a-voir) : autrement dit je vais voir le psy parce que je ne sais décidément pas ce que j'ai (parce que je ne suis pas bien) ; alors que je cherche ce que je suis où qui je suis dans la philosophie (où il me semble que j'ai le bien, à portée de main)] - 216 - c'est à la communication des ics qu'en fin de compte il faudrait se fier pour que se produisent au mieux chez l'analyste les aperceptions décisives. - on pourrait même concevoir un inconscient réserve [dont le sujet averti] (...) par l'expérience de l'analyse didactique, sache, en quelque sorte, en jouer comme d'un instrument, comme de la caisse du violon dont par ailleurs il possède les cordes. Ce n'est tout de même pas d'un ics brut, qu'il s'agit chez lui, mais d'un ics assoupli, d'un ics plus l'expérience de cet ics. - Ce n'est pas qu'il soit accessible aux hommes de bonne volonté - il ne l'est pas. C'est dans des conditions strictement limitées que l'on peut l'atteindre, par un détour, le détour de l'Autre, qui rend nécessaire l'analyse, et réduit de façon infrangible les possibilités de l'auto-analyse - 218 - Toute découverte de son propre ics se présente comme un stade de la traduction en cours d'un ics qui est d'abord ics de l'Autre. - 312 - il y a cette supposition - que le désir ne se présente pas à visage découvert [comme dans la philosophie] - les désirs sont partout, et au cœur même de nos efforts pour nous en rendre maîtres. Bien loin de là, même à les combattre, nous ne faisons guère plus que d'y satisfaire. Je dis y et non les , car dire les satisfaire serait encore trop, ce serait les tenir pour saisissable - Y satisfaire se dit ici comme on dit, dans le sens opposé, y couper , ou n'y pas couper - à mesure même d'un dessein fondamental, justement, d'y couper. - 313 - l'accent y est mis sur une extension (...) de la méconnaissance fondamentale

1961/62 - L'identification - 13/12/61 - le problème de l'inconscient pour nous, c'est [celui] de l'autonomie du sujet pour autant qu'elle n'est pas seulement préservée, qu'elle est accentuée comme jamais elle ne le fut dans notre champ, et précisément de ce paradoxe que ces cheminements que nous y découvrons ne sont point concevables si à proprement parler ce n'est le sujet qui en est le guide et de façon d'autant plus sûre que c'est sans le savoir, sans en être complice, si, je puis dire : "conscius", parce qu'il ne peut progresser vers rien ni en rien qu'à ne le repérer qu'après-coup, car rien qui ne soit par lui engendré justement qu'à mesure de le méconnaître d'abord. - De cette permanence du sujet, je vous montre la référence et non la présence

1964 - Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse - 25 - Elle [la cause] se distingue de ce qu'il y a de déterminant dans une chaîne, autrement dit de la loi. Pour l'exemplifier, pensez à ce qui s'image dans la loi de l'action et de la réaction. Il n'y a ici, si vous voulez, qu'un seul tenant. l'un ne va pas sans l'autre. - Au contraire, chaque fois que nous parlons de cause, il y a toujours quelque chose d'anti-conceptuel, d'indéfini. Les phases de la lune sont la cause des marées - ça, c'est vivant, nous savons à ce moment-là que le mot cause est bien employé. Ou encore, les miasmes sont la cause de la fièvre - ça aussi, ça ne veut rien dire, il y a un trou, et quelque chose qui vient osciller dans l'intervalle. Bref, il n'y a de cause que ce qui cloche. Eh bien ! l'ics freudien, c'est à ce point que j'essaie de vous faire viser par approximation qu'il se situe, à ce point où, entre la cause et ce qu'elle affecte, il y a toujours la clocherie. L'important n'est pas que l'ics détermine la névrose - là-dessus Freud a très volontiers le geste pilatique de se laver les mains. Un jour ou l'autre, on trouvera peut-être quelque chose, des déterminants humoraux, peu importe - ça lui est égal. car l'ics nous montre la béance par où la névrose se raccorde à un réel - réel qui peut bien, lui, n'être pas déterminé. - et qu'est-ce qu'il trouve, dans le trou, dans la fente, dans la béance caractéristique de la cause ? Quelque chose de l'ordre du non-réalisé. On parle de refus. C'est aller trop vite en la matière - L'ics, d'abord, se manifeste à nous comme quelque chose qui se tient en attente dans l'aire, dirai-je, du non-né. Que le refoulement y déverse quelque chose, n'est pas étonnant. - ces actifs orthopédeutes qe sont dévenus les analystes de la seconde et de la troisième génération, (...) se sont employés, en psychologisant la théorie analytique, à suturer cette béance. - Achoppement, défaillance, fêlure. Dans une phrase prononcée, écrite, quelque chose vient à trébucher. - Là, quelque chose d'autre demande à se réaliser - qui apparaît comme intentionnel, certes, mais d'une étrange temporalité. Ce qui se produit dans cette béance, au sens plein du terme se produire, se présente comme la trouvaille. - Or cette trouvaille, dès qu'elle se présente, est retrouvaille, et qui plus est, elle est toujours prête à se dérober à nouveau, instaurant la dimension de la perte. - 28 - Vous m'accorderez que le un qui est introduit par l'expérience de l'ics, c'est le un de la fente, du trait, de la rupture. - Où est le fond ? Est-ce l'absence ? Non pas. La rupture, la fente, le trait de l'ouverture fait surgir l'absence - comme le cri non pas se profile sur fond de silence, mais au contraire le fait surgir comme silence. - Voilà où nous retrouvons la structure basale, qui rend possible, de façon opératoire, que quelque chose prenne la fonction de barrer, de rayer, une autre chose. Niveau plus primordial, structuralement, que le refoulement dont nous parlerons plus tard. Eh bien, cet élément opératoire de l'effacement, c'est ce que Freud désigne, dès l'origine, dans la fonction de la CENSURE. - c'est bien là ce sur quoi porte, de la façon la plus efficiente, le dynamisme de l'inconscient. - 32 - l'ordre de l'ics, - c'est que ce n'est ni être, ni non-être, c'est du non-réalisé. - 34 - Le statut de l'cis (...) est éthique. - 40 - Rien, en effet, ne peut être fondé sur le hasard - calcul de chances, stratégies - qui n'implique au départ une structuration limitée de la situation, et cela en termes de signifiants. Quand la théorie moderne des jeux élabore la stratégie des deux partenaires, ils se rencontrent avec les chances maxima, chacun, de l'emporter à condition de, chacun, raisonner comme l'autre. Qu'est-ce qui donne sa valeur à une opération de cette espèce ? - sinon que, déjà, la carte est faite, les points de repère signifiants du problème y sont inscrits, et la solution ne les dépassera jamais. Eh bien ! pour ce qui est de l'ics, Freud réduit tout ce qui vient à portée de son écoute, à la fonction de purs signifiants. C'est à partir de cette réduction que ça opére, et que peut apparaît, dit Freud, un moment de conclure - un moment où il se sent le courage de juger et de conclure. C'est là [dans cette situation… logique] ce qui fait partie de ce que j'ai appelé son témoignage éthique. - 116 - L'ics est la somme des effets de la parole sur un sujet, à ce niveau où le sujet se constitue des effets du signifiant. - 138 - La réalité de l'ics, c'est - vérité insoutenable - la réalité sexuelle. - 140 - nous devons considérer l'ics comme une rémanence de cette jonction archaïque de la pensée avec la réalité sexuelle. - 142 - Seule la présence du sujet qui désire, et qui désire sexuellement, nous apporte cette dimension de métaphore naturelle, d'où se décide la prétendue identité de la perception [caractérisant l'ics selon Freud]. - Ce n'est qu'en raison de la sexualisation de ces objets que l'hallucination du rêve est possible - car, vous pouvez le remarquer, la petite Anna n'hallucine que les objets interdits. - la dimension de signification est absolument essentielle à repérer dans toute hallucination pour nous permettre de saisir ce dont il s'agit dans le principe du plaisir.

1964 - Position de l'inconscient - 830 - L'ics est un concept forgé sur la trace de ce qui opère pour constituer le sujet. - 830 - L'ics n'est pas une espèce définissant dans la réalité psychique le cercle de ce qui n'a pas l'attribut (ou la vertu) de la conscience. - l'ics d'avant Freud n'est pas purement et simplement - L'ics avant Freud n'est rien de plus consistant que cet in-noir, soit l'ensemble de ce qu'on ordonnerait aux sens divers du mot noir - 832 - La seule fonction homogène de la conscience est dans la capture imaginaire du moi par son reflet spéculaire et dans la fonction de méconnaissance qui lui en reste attachée. - 834 - la présence de l'ics, pour se situer au lieu de l'Autre, est à chercher en tout discours, en son énonciation. - 839 - Le sujet, le sujet cartésien, est le présupposé de l'ics - L'Autre est la dimension exigée de ce que la parole s'affirme en vérité. L'ics est entre eux leur coupure en acte.