Parole

1953 - Fonction et champ de la parole… - 123 - la psychanalyse n'a qu'un médium : la parole du patient. L'évidence du fait n'excuse pas qu'on le néglige. Or toute parole appelle réponse. - même si elle ne rencontre que le silence, pourvu qu'elle ait un auditeur, et (...) c'est là le cœur de sa fonction en psychanalyse. - 135 - quand le sujet s'engage dans l'analyse, il accepte une position plus constituante en elle-même que toutes les consignes dont il se laisse plus ou moins leurrer : celle de l'interlocution -- 146 - dès que l'analyse est engagée dans la voie du transfert (...) chaque rêve du patient s'interprète comme provocation, aveu larvé ou diversion, par sa relation au discours analytique, et qu'à mesure du progrès de l'analyse, ils se réduisent toujours plus à la fonction d'éléments du dialogue qui s'y réduisent - 184 - L'analyse ne peut avoir pour but que l'avènement d'une parole vraie et la réalisation par le sujet de son histoire dans sa relation à un futur.- 133 - Soyons catégorique, il ne s'agit pas dans l'anamnèse psychanalytique de réalité, mais de vérité, parce que c'est l'effet d'une parole pleine de réordonner les contingences passées en leur donnant le sens des nécessités à venir, telles que les constitue le peu de liberté par où le sujet les fait présentes. - 147 - il est clair que tout acte manqué est un discours réussi, et que dans le lapsus c'est le bâillon qui tourne sur la parole, et juste du quadrant qu'il faut pour qu'un bon entendeur y trouve son salut. - 150 - Comment la parole épuiserait-elle le sens de la parole (...) sinon dans l'acte qui l'engendre. [Goethe:] "Au commencement était l'action" se renverse à son tour : c'était bien le verbe qui était au commencement, et nous vivons dans sa création, mais c'est l'action de notre esprit qui continue cette création en la renouvelant toujours. - 159 - dans la folie [psychose], quelle qu'en soit la nature, il nous faut reconnaître d'une part, la liberté négative d'une parole qui a renoncé à se faire reconnaître (...) un langage sans dialectique. L'absence de parole s'y manifeste par les stéréotypies d'un discours où le sujet, peut-on dire, est parlé plutôt qu'il ne parle - 160 - [symptôme] La parole est ici chassée du discours concret qui ordonne la conscience, mais elle trouve son support ou bien dans les fonctions naturelles du sujet, pour peu qu'une épine organique y amorce cette béance de son être individuel à son essence, qui fait de la maladie l'introduction du vivant à l'existence du sujet, [note n° 22 de Lacan : Pour obtenir immédiatement la confirmation subjective de cette remarque de Hegel, il suffit d'avoir vu, dans l'épidémie récente, un lapin aveugle au milieu d'une route, érigeant vers le soleil couchant le vide de sa vision changée en regard : il est humain jusqu'au tragique.] - ou bien dans les images qui organisent à la limite de l'umwelt et de l'innenwelt leur structuration relationnelle. Le symptôme est ici le signifiant d'un signifié refoulé de la conscience du sujet. Symbole écrit sur le sable de la chair et sur le voile de Maïa - Mais c'est une parole de plein exercice, car elle inclut le discours de l'autre dans le secret de son chiffre. - 161 - Le troisième paradoxe de la relation du langage à la parole est celui du sujet qui perd son sens dans les objectivations du discours. - Car c'est là l'aliénation la plus profonde du sujet de la civilisation scientifique et c'est elle que nous rencontrons d'abord quand le sujet commence à nous parler de lui - 162 - Ici c'est un mur de langage qui s'oppose à la parole. - 163 - La ressemblance de cette situation [terme déjà péjoratif chez Lacan] avec l'aliénation de la folie (...) à savoir que le sujet y est parlé plutôt qu'il ne parle - 175 - Pour libérer la parole du sujet, nous l'introduisons au langage de son désir, cad au langage premier dans lequel, au-delà de ce qu'il nous dit de lui, déjà il nous parle à son insu, et dans les symboles du symptôme tout d'abord. - 193 - l'abstention de l'analyste, son refus de répondre, est un élément de la réalité dans l'analyse. Plus exactement, c'est dans cette négativité en tant qu'elle est pure, cad détachée de tout motif particulier, que réside la jointure entre le symbolique et le réel. - Il reste que cette abstention n'est pas soutenue indéfiniment ; quand la question du sujet a pris forme de vraie parole, nous la sanctionnons de notre réponse, mais aussi avons-nous montré qu'une vraie parole contient déjà sa réponse et que seulement nous doublons de notre lai son antenne. Qu'est-ce à dire ? Sinon que nous ne faisons rien que donner à la parole du sujet sa ponctuation dialectique.

1953 - Discours du Congrès de Rome et réponse aux interventions - S'il s'agissait dans celui-là [le mot] du concours de la pure matérialité du langage avec l'effet optimum de l'acte de reconnaissance (....) (....) [la parole, elle] apparaît avec éclat dans le "tu es ma femme" ou le "tu es mon maître" - A quoi se voit de façon exemplaire que la parole n'est en aucun des sujets, mais en le serment qui les fonde -

1953/54 - Les écrits techniques de Freud - 126 - La parole pleine est celle qui vise, qui forme la vérité telle qu'elle s'établit dans la reconnaissance de l'un par l'autre. La parole pleine est parole qui fait acte. Un des sujets se trouve, après, autre qu'il n'était avant. - [Le paradoxe c'est qu'apparemment la méthode psychanalytique] parte par une voie strictement opposée, pour autant qu'elle donne comme consigne au sujet de délinéer une parole aussi dénouée que possible de toute supposition de responsabilité, et qu'elle le libère même de toute exigence d'authenticité. Elle lui enjoint de dire tout ce qui lui passe par la tête. - 127 - Dans son essence, le transfert (...) c'est tout simplement l'acte de la parole. Chaque fois qu'un homme parle à un autre d'une façon authentique et pleine (...) - il se passe quelque chose qui change la nature des deux êtres en présence. / Mais il s'agit là d'un autre transfert que celui qui s'est d'abord présenté dans l'analyse non seulement comme un problème, mais comme un obstacle. Cette [dernière] fonction, en effet, est à situer sur le plan imaginaire. - 254 - l'être, le verbe même, n'existe que dans le registre de la parole. La parole introduit le creux de l'être dans la texture du réel - 264 - Le grognement du pourceau ne devient une parole que lorsque quelqu'un se pose la question de savoir ce qu'il veut faire croire. - Et que veulent faire croire, en grognant, les compagnons d'Ulysse transformés en pourceaux ? - qu'ils ont encore quelque chose d'humain. - La parole est essentiellement le moyen d'être reconnu [reconnaissance]. - Sans cette dimension, une communication n'est que quelque chose qui transmet - 275 - [R. P. Beirnaert, commentant St Augustin : Interrogation d'Augustin à son fils - Qu'est-ce que nous voulons faire, quand nous parlons ? réponse - Nous voulons enseigner ou apprendre, suivant la position de maître ou de disciple. Saint Augustin va essayer de montrer que, même quand on veut apprendre et qu'on interroge pour apprendre, on enseigne encore. Pourquoi ? Parce que l'on enseigne à celui à qui l'on s'adresse dans quelle direction l'on veut savoir. Donc, définition générale - Tu vois donc, mon cher, que par le langage, on ne fait rien d'autre qu'enseigner. ] C'est pourquoi toute parole est déjà, comme telle, un enseigner. Elle n'est pas un jeu de signes, elle se situe, non pas au niveau de l'information, mais à celui de la vérité. [vérité du désir au-delà de la demande ?] - 272 - la signification d'un terme doit être définie par l'ensemble de ses emplois possibles. Cela peut s'étendre aussi à des groupes de termes. - Mais [comme le lui a dit Benveniste] il y a une limite, et c'est celle-ci - la phrase, elle, n'a pas d'emploi. Il y a donc deux zones de la signification [: la parole et le langage] -289 - Toute parole formulée comme telle introduit dans le monde le nouveau de l'émergence du sens. Ce n'est pas qu'elle s'affirme comme vérité, mais plutôt qu'elle introduit dans le réel la dimension de la vérité. - l'erreur est l'incarnation habituelle de la vérité - 290 - [En règle générale] l'Erreur se démontre telle en ce que, à un moment donné, elle aboutit à une contradiction. - 291 - Le propre du champ psychanalytique est de supposer en effet que le discours du sujet se développe normalement (...) dans l'ordre de l'erreur, de la méconnaissance, voire de la dénégation - ce n'est pas tout à fait le mensonge, c'est entre l'erreur et le mensonge. - Mais - voici le nouveau - pendant l'analyse, dans ce discours qui se développe dans le registre de l'erreur, quelque chose arrive par où la vérité fait irruption, et ce n'est pas la contradiction. - 292 - Nos actes manqués sont des actes qui réussissent, nos paroles qui achoppent sont des paroles qui avouent. - la vérité rattrape l'erreur au collet dans la méprise. - [Le sujet] C'est qu'il en dit toujours plus qu'il ne veut en dire, toujours plus qu'il ne sais en dire. - 293 - [Objection possible :] Pourquoi le discours, que vous décelez derrière le discours de la méprise ne tombe-t-il pas sous la même objection que celui-ci ? Si c'est un discours comme l'autre, pourquoi n'est-il pas, lui aussi, également plongé dans l'erreur ? / Toute conception de style jungien, (...) qui fait de l'ics, sous le nom d'archétype, [mais aussi l'ics de type philosophique] le lieu réel d'un autre discours, tombe en effet, d'une façon catégorique, sous cette objection. [Justement, ce n'est pas un autre discours, mais une parole.] - 294 - une parole émerge qui dépasse le sujet discourant. - Car, observez-le bien, chaque fois qu'il y a refoulement (...) il y a toujours interruption du discours. Le sujet dit que le mot lui manque.

1954 - Introduction et réponse au commentaire de Jean Hyppolite... - 373 (Note 1) [analysant] Le sujet (...) commence l'analyse en parlant de lui sans vous parler à vous, ou en parlant à vous sans parler de lui. Quand il pourra vous parler de lui, l'analyse sera terminée.

1954/55 - Le moi dans la théorie de Freud - 232 - Avez-vous réfléchi qu'une lettre, c'est justement une parole qui vole ? S'il peut y avoir une lettre volée, c'est qu'une lettre est une feuille volante. - 233 - Dès lors que c'est une parole - Elle a la fonction d'un certain pacte, d'une certaine confidence - [Peu importe laquelle] - Elle est là, dissimulée dans une espèce de présence-absence. Elle n'est là dans sa valeur propre que par rapport à tout ce qu'elle menace, à tout ce qu'elle viole, à tout ce qu'elle bafoue, à tout ce qu'elle met en danger ou en suspens. / C'est une vérité qui n'est pas bonne à publier - 236 - La police croyant à la force, et du même coup au réel, cherche la lettre. Comme ils le disent - On a cherché partout . Et ils n'ont pas trouvé, parce qu'il s'agit d'une lettre, et qu'une lettre [comme le sujet] est justement nulle part. - Ils l'on vue. - Mais ils ne l'ont pas reconnue. - Vous voyez bien qu'il ne peut y avoir quelque chose de caché que dans la dimension de la vérité. Dans le réel, l'idée même d'une cachette est délirante - C'est la vérité qui est cachée, ce n'est pas la lettre. - 335 - [cf. l'apologue des 3 prisonniers] La parole s'introduit [quand le sujet] (..) affirme tout simplement - Je suis blanc . - Je ne vous donne pas ça comme un modèle de raisonnement logique, mais comme un sophisme, destiné à manifester la distinction qu'il y a entre le langage appliqué à l'imaginaire - car les deux autres sujets sont parfaitement imaginaires pour le troisième, il les imagine, ils sont seulement la structure réciproque en tant que telle - et le moment symbolique du langage, cad le moment de l'affirmation. - 336 - Il y a une troisième dimension du temps qui (..) ne leur appartient pas [aux machines], et que j'essaie de vous imaginer par ce mouvement qui n'est ni le retard, ni l'avance, mais la hâte, liaison propre de l'être humain au temps, au chariot du temps, qui est là, à le talonner par derrière. C'est là que se situe la parole, et que ne situe pas le langage [des machines], qui, lui, a tout le temps.

1955 - Variantes de la cure-type - 351 - La parole apparaît donc d'autant plus vraiment une parole que sa vérité est moins fondée dans ce qu'on appelle l'adéquation à la chose : la vraie parole s'oppose ainsi paradoxalement au discours vrai, leur vérité se distinguant par ceci que la première constitue la reconnaissance par les sujets de leurs êtres en ce qu'il y sont intér-essés, tandis que la seconde est constituée par la connaissance du réel, en tant qu'il est visé par le sujet dans les objets. Mais chacune des vérités ici distinguées s'altère à croiser l'autre dans sa voie. - 352 - Comment (...) le discours intermédiaire, celui où le sujet, dans son dessein de se faire reconnaître, adresse la parole à l'autre en tenant compte de ce qu'il sait de son être comme donné, ne serait-il pas contraint aux cheminements de la ruse ?

1955 - La Chose freudienne - 409 - [Prosopopée de la vérité:] Mais pour que vous me trouviez où je suis, je vais vous apprendre à quel signe me reconnaître. Hommes, écoutez, je vous en donne le secret. Moi, la vérité, je parle. - Le discours de l'erreur, son articulation en acte, pouvait [peut] témoigner de la vérité contre l'évidence elle-même. - 410 - je vagabonde dans ce que vous tenez pour être le moins vrai par essence : dans le rêve, dans le défi au sens de la pointe la plus gongorique et le nonsense du calembour le plus grotesque, dans le hasard, et non pas dans sa loi, mais dans sa contingence - Le commerce au long cours de la vérité ne passe plus par la pensée : chose étrange, il semble que ce soit désormais par les choses : rébus , c'est par vous que je communique - 413 - ça parle, et là sans doute où l'on s'y attendait le moins, là où ça souffre. - La vérité a dit : "Je parle". Pour que nous reconnaissions ce "je" à ce qu'il parle, peut-être n'était-ce pas sur le "je" qu'il fallait nous jeter, mais aux arêtes du parler que nous devions nous arrêter. "Il n'est de de parole que de langage" nous rappelle que le langage est un ordre que des lois constituent, desquelles nous pourrions apprendre au moins ce qu'elles excluent. Par exemple que la langage, c'est différent de l'expression naturelle et que ce n'est pas non plus un code ; que ça ne se confond pas avec l'information - 419 - l'objectivation en matière psychologique est soumise dans son principe à une loi de méconnaissance - C'est-à-dire que ce n'est pas de lui [l'analysant] que vous avez à lui parler, car il suffit à cette tâche, et ce faisant, ce n'est même pas à vous qu'il parle : si c'est à lui que vous avez à parler, c'est littéralement d'autre chose, c'est-à-dire d'une chose autre que ce dont il s'agit quand il parle de lui, et qui est la chose qui vous parle, chose qui, quoi qu'il dise, lui resterait à jamais inaccessible, si d'être une parole qui s'adresse à vous elle ne pouvait évoquer en vous sa réponse et si, d'en avoir entendu le message sous cette forme inversée, vous ne pouviez, à le lui retourner, lui donner la double satisfaction de l'avoir reconnu et de lui en faire reconnaître la vérité. [analyse]

1955/56 - Les psychoses - 48 - à l'intérieur de la notion de communication en tant que généralisée, je spécifie ce que c'est que la parole en tant que parler à l'autre. C'est faire parler l'autre comme tel. - Cet autre, nous l'écrirons (...) avec un grand A. - ÷ Et pourquoi (...) ? - Tu es ma femme (...) Tu es mon maître (...) Ce qui fait (...) la valeur fondatrice de ces paroles, c'est que ce qui est visé dans le message, aussi bien que ce qui est manifeste dans la feinte, c'est que l'autre est là en tant qu'Autre absolu. Absolu, cad qu'il est reconnu [reconnaissance], mais qu'il n'est pas connu. - [Seulement on ne doit pas ignorer que la parole] ne parle pas seulement à l'autre, elle parle de l'autre en tant qu'objet. Et c'est bien de cela qu'il s'agit quand un sujet vous parle de lui. - 50 - l'objet, en tant qu'il est primitivement objet de rivalité et de concurrence. Il n'intéresse qu'en tant qu'objet du désir de l'autre. - [Ceci] est précisément ce qui est surmonté dans la parole, pour autant qu'elle intéresse le tiers. - 47 - Qu'est-ce que la parole ? - Qu'est-ce qui distingue une parole, d'un enregistrement de langage ? - Parler, c'est avant tout parler à d'autres ? - Pour nous, la structure de la parole (...) c'est que le sujet reçoit son message de l'autre sous une forme inversée. - Nous en avons deux formes exemplaires. / La première, c'est fides , la parole qui se donne, le Tu es ma femme ou le Tu es mon maître , ce qui veut dire (...) Cela vient de toi pour y trouver la certitude de ce que j'engage. Cette parole est une parole qui t'engage, toi. - [La deuxième forme où] se reconnaît la relation de sujet à sujet (...) c'est la feinte, envers de fides . [Je vais à Cracovie... etc.] - 57 - [pour expliquer la pièce rapportée du fantasme psychotique] Nous avons à notre disposition le mécanisme de la projection. - [Mais qui ne convient pas vraiment] - Bien plutôt nous devons dire que ce qui est rejeté (...) revient de l'extérieur . - 59 - [Ex. Je viens de chez le charcutier [pour dire : "cochon!"]. Réponse du berger à la bergère : Truie . Or ce n'est justement pas le même message sous sa forme inversée, comme il est patent dans la parole, qui va de a à A . Ici c'est son propre message, qui va de a à a' .] - 62 - Qui est-ce qui parle ? Puisqu'il y a hallucination, c'est la réalité qui parle. [soit petit a (utre). Car ] quand l'Autre avec un grand A parle, ce n'est pas purement et simplement la réalité devant laquelle vous êtes, à avoir l'individu qui articule. L'Autre est au-delà de cette réalité. - 63 - En d'autres termes, quand une marionnette parle [ce qu'est tout individu, comme tel], ce n'est pas elle qui parle, c'est quelqu'un derrière.- Que la parole s'exprime dans le réel veut dire qu'elle s'exprime dans la marionnette. - Le petit a , c'est le monsieur qu'elle rencontre dans le couloir, et il n'y a pas de grand A. petit a' , c'est ce qui dit Je viens de chez le charcutier Et de qui dit-on Je viens de chez le charcutier ? De S. Petit a lui a dit Truie . - 64 - Il n'y a que deux façons de parler ce S, de ce sujet que nous sommes radicalement, c'est - soit de s'adresser vraiment à l'Autre, grand A, et d'en recevoir le message qui vous concerne sous une forme inversée, - soit d'indiquer sa direction, son existence, sous la forme de l'allusion. Si cette femme est (...) une paranoïaque, c'est que le cycle, pour elle, comporte une exclusion du grand Autre. Le circuit se referme sur les deux petits autres - Elle parle tellement bien par allusion qu'elle ne sait pas ce qu'elle en dit. - Moi la truie, je viens de chez le charcutier, je suis déjà disjointe, corps morcelé, (...), délirante, et mon monde s'en va en morceaux, comme moi-même. - 75 - nous pouvons, à l'intérieur même du phénomène de la parole, intégrer les trois plans du symbolique, représenté par le signifiant, de l'imaginaire, représenté par la signification, et du réel, qui est le discours bel et bien tenu réellement dans sa dimension diachronique.[RSI] - 285 - Il arrive que nous prenions des pré-psychotiques en analyse, et nous savons ce que cela donne - cela donne des psychotiques. - Quelque fois il s'agit d'une très petite tâche de prise de parole [qui déclanche la psychose], alors que le sujet vivait jusque-là dans son cocon, comme une mite. [cf. Schreber, devenant président de la cour d'appel] - 335 - ça parle.

1957/58 - Les formations de l'inconscient - 08/01/58 - "tu es mon maître" - ce "TU", c'est le signifiant de l'appel à l'Autre - "tu es celui qui me suivras" - ceci s'appelle l'invocation. - "tu es celui qui me suivra" - cela peut vouloir dire : tu es celui qui me suivra toujours, et j'en ai ma claque. - l'invocation (...) veut dire que je fais appel à la voix, cad à ce qui supporte la parole - [le trait d'esprit est une évocation ou une] provocation qui ne réussit pas au grand tour de force, au grand miracle de l'invocation. - 16/04/58 - J'appelle ici symptôme dans son sens le plus général, aussi bien le symptôme morbide que le rêve - Ce que j'appelle symptôme, c'est ce qui est analysable. - Freud (...) nous apprend (...) à ce propos que le symptôme parle dans la séance, le Ça parle dont je vous parle tout le temps - Plus tard il a dit que les borborygmes de ses patients venaient se faire entendre et parler dans la séance, et avaient une signification de paroles. - dans les séances, même les douleurs en tant qu'elles réapparaissent, qu'elles s'accentuent (...) font partie du discours du sujet, qu'il mesure au ton, à la modulation de ses sujets - [ceci suppose que 1) tout ce qui (non)dit est parole, 2) ces paroles sont des symptômes car tout symptôme est parole.] [analyse] - 25/06/58 - cet Autre comme lieu de la parole, il nous est immédiatement et effectivement donné comme sujet, cad comme sujet qui nous pense nous-mêmes comme son autre. - cet autre de l'autre c'est là même où s'articule le discours de l'inconscient, ce quelque chose d'articulé qui n'est pas par nous articulable. - C'est cela que je veux dire quand je vous dis que l'ics c'est le discours de l'Autre. - en ce lieu de la parole nous faisons vivre un autre capable de nous répondre. C'est bien ce pourquoi il nous est opaque, c'est parce qu'il y a quelque chose que nous ne connaissons pas en lui, et qui nous sépare de sa réponse à notre demande, et ce n'est pas autrechose qui s'appelle son désir.

1959/60 - L'éthique de la psychanalyse - 205 - je voudrais bien savoir en face de qui, en face de quoi, il était sur le Sinaï et sur l'Hreb. Mais enfin, faute d'avoir pu soutenir l'éclat de la face de celui qui a dit Je suis ce que je suis , nous nous contenterons de dire (...) que le buisson ardent, c'était la Chose de Moïse -

1960 - Remarque sur le rapport de Daniel Lagache - 684 - Or sur ces tables [de la Loi], rien n'est écrit pour qui sait lire hormis les lois de la Parole même.

1961/62 - L'identification - 29/11/61 - Ma chienne à mon sens et sans aucune ambiguïté, parle. Ma chienne a la parole sans aucun doute. Ceci est important, car cela ne veut pas dire qu'elle ait totalement le langage. - Je dis qu'elle parle, pour quoi ? Elle ne parle pas tout le temps, elle parle, contrairement à beaucoup d'humains, uniquement dans les besoins [?] où elle a besoin de parler. - il ne faut pas croire que tout soit centré sur le besoin, il y a une certaine relation sans doute avec cet élément de consommation, mais l'élément communicationnel du fait qu'elle consomme avec les autres y est aussi présent. - [seulement] contrairement à ce qui se passe chez l'homme en tant qu'il parle, elle ne me prend jamais pour un autre. - Le sujet-pur-parlant comme tel, c'est la naissance même de notre expérience, est amené (...) à vous prendre toujours pour un autre. - à vous prendre pour un autre, le sujet vous met au niveau de l'Autre avec un grand A. C'est justement cela qui manque à ma chienne : il n'y a pour elle que le petit autre. - manque à ma chienne cette sorte de possibilité (...) qui s'appelle la capacité de transfert - [et plus matériellement, manquent à la chienne les] effets de langue : il n'y a rien qui fasse un claquement par exemple, et encore bien moins qui fasse une occlusion ; il y a flottement, frémissement, souffle (...) mais il n'y a pas d'occlusion. - [c'est] justement ce qu'elle a de commun avec une activité parlante que vous connaissez bien et qui s'appelle le chant. S'il arrive si souvent que vous ne compreniez pas ce que jaspine la chanteuse, c'est justement parce qu'on ne peut pas chanter les occlusives.