Symbolique

1953 - Le Réel, l'Imaginaire, le Symbolique - toute relation analysable, cad interprétable symboliquement, est toujours plus ou moins inscrite dans une relation à trois. - par l'intermédiaire de la réalisation œdipienne. - il faut qu'il y ait la médiation d'un tiers personnage qui réalise, par rapport au sujet, l'élément transcendant grâce à quoi son rapport à l'objet peut être soutenu à une certaine distance. - [temps] C'est ce qui caractérise l'espèce humaine, justement, d'environner le cadavre de quelque chose qui constitue une sépulture, de maintenir le fait que "ceci a duré". Le tumulus ou n'importe quel autre signe de sépulture mérite très exactement le nom de symbole, de quelque chose d'humanisant.

1953 - Fonction et champ de la parole… - 151 - Est-ce à ces dons ou bien aux mots de passe qui y accordent leur non-sens salutaire, que commence le langage avec la loi ? Car ces dons sont déjà symboles, en ceci que symbole veut dire pacte, et qu'ils sont d'abord signifiants du pacte qu'ils constituent comme signifié : comme il se voit bien à ceci que les objets de l'échange symbolique, vases faits pour être vides, boucliers trop lourds pour être portés, gerbes qui se dessècheront, piques qu'on enfonce au sol, sont sans usage par destination, sinon superflus par leur abondance. Cette neutralisation du signifiant est-elle le tout de la nature du langage ? Pris à ce taux, on en trouverait l'amorce chez les hirondelles de mer, par exemple, pendant la parade, et matérialisée dans le poisson qu'elles se passent de bec en bec - On voit que nous ne reculons pas à chercher hors du domaine humain les origines du comportement symbolique. Mais ce n'est certainement pas par la voie d'une élaboration du signe  - 155 - L'homme parle donc, mais c'est parce que le symbole l'a fait homme. - 155 - Si (...) des dons surabondants accueillent l'étranger qui s'est fait connaître, la vie des groupes naturels qui constituent la communauté est soumise aux règles de l'alliance, ordonnant le sens dans lequel s'opère l'échange des femmes - 156 - A l'alliance préside un ordre préférentiel dont la loi impliquant les noms de parenté est pour le groupe, comme le langage, impérative en ses formes, mais inconsciente en sa structure. - 157 - Car nul pouvoir sans les nominations de la parenté - 157 - C'est dans le nom du père qu'il nous faut reconnaître le support de la fonction symbolique qui, depuis l'orée des temps historiques, identifie sa personne à la figure de la loi.

1953/54 - Les écrits techniques de Freud - 80 - le réel, ou ce qui est perçu comme tel, est ce qui résiste absolument à la symbolisation. - En fin de compte, le sentiment du réel ne se présente-t-il pas à son maximum, dans la brûlante manifestation d'une réalité irréelle, hallucinatoire ? - 248 - qu'est-ce qui fonde cette relation [maître/esclave]. Ce n'est pas que celui qui s'avoue vaincu demande grâce et crie, c'est que le maître se soit engagé dans cette lutte pour des raisons de pur prestige, et qu'il y ait risqué sa vie. Ce risque établit sa supériorité, et c'est au nom de ça, non de sa force, qu'il est reconnu pour maître par l'esclave. / Cette situation commence par une impasse, car sa reconnaissance par l'esclave ne vaut rien pour le maître, puisque ce n'est qu'un esclave qui le reconnaît, cad quelqu'un que lui ne reconnaît pas comme un homme. [cette situation] n'est pas sans affinité avec l'impasse de la situation imaginaire. / Pourtant cette situation va se dérouler. Son point de départ est mythique, puisque imaginaire. Mais ses prolongements nous introduisent sans le plan symbolique. - une action s'organise, et s'établit la relation de la jouissance et du travail. Une loi s'impose à l'esclave, qui est de satisfaire le désir et la jouissance de l'autre. Il ne suffit pas qu'il demande grâce, il faut qu'il aille au boulot. Et quand on va au boulot, il y a des règles, des heures - nous entrons dans le domaine du symbolique.

1954/55 - Le moi dans la théorie de Freud... - 41 - La fonction symbolique n'est pas nouvelle en tant que fonction, elle a des amorces ailleurs que dans l'ordre humain - [mais en tant qu'elle] intervient à tous les moments et à tous les degrés de son existence [de l'HOMME]. - 42 - il faut que nous partions de l'idée que cet ordre [humain] constitue une TOTALITÉ. La totalité dans l'ordre symbolique s'appelle un univers. L'ordre symbolique est donné d'abord dans son caractère universel. / Ce n'est pas peu à peu qu'il se constitue. Dès que le symbole vient, il y a un univers de symboles. - Ce n'est pas pour rien que Lévi-Strauss appelle ses structures élémentaires - il ne dit pas primitives . Elémentaire est le contraire de complexe . - Plus nous nous rapprochons, non de l'origine, mais de L'ÉLÉMENT, plus s'imposent la structuration, l'ampleur, l'intrication du système proprement symbolique de la nomenclature. - 43 - Quelle solution pourrait-on bien attendre du mot de COLLECTIF en cette occasion, alors que le collectif et l'individuel, c'est strictement la même chose ? Non, il ne s'agit pas de supposer quelque part une âme commune où tous ces calculs auraient lieu, il ne s'agit d'aucune entification psychologique - une espèce de grand animal - (...) c'est ça, l'ics collectif. - 51 - [J. Hyppolite : "La fonction symbolique est pour vous, si je comprends bien, une fonction de transcendance, en ce que, tout à la fois, nous ne pouvons pas y rester, nous ne pouvons pas en sortir.] Bien sûr. C'est la présence dans l'absence et l'absence dans la présence. - 122 - à propos de l'extériorité et de l'intériorité - cette distinction n'a aucun sens au niveau du réel. Le réel est sans fissure. - nous n'avons aucun autre moyen de l'appréhender (...) que par l'intermédiaire du symbolique. - 202 - Le pouvoir de nommer les OBJETS structure la perception elle-même. - C'est par la nomination que l'homme fait subsister les objets dans une certaine consistance. S'ils n'étaient que dans un rapport narcissique avec le sujet, les objets ne seraient jamais perçus que de façon instantanée. Le mot, le mot qui nomme, c'est l'identique. Le mot répond non pas à la distinction spatiale de l'objet, toujours prête à se dissoudre dans une identification au sujet, mais à sa dimension temporelle. - Le nom est le temps de l'objet. La nomination constitue un pacte, par lequel deux sujets en même temps s'accordent à reconnaître le même objet. - 226 - Le pari est au centre de toute question radicale portant sur la pensée symbolique. Tout se ramène au to be or not to be , au choix entre ce qui va sortir ou pas, au couple primordial du plus et du moins . - [mais] il n'y a pas pur jeu de hasard, mais déjà articulation d'une parole avec une autre. - En d'autres termes, il n'y a pas jeu s'il n'y a pas question, il n'y a pas question s'il n'y a pas structure. - 227 - La question est composée, organisée, par la structure. / En lui-même, le jeu du symbole représente et organise, indépendamment des particularités de son support humain, ce quelque chose qui s'appelle un sujet. Le sujet humain ne fomente pas ce jeu, il y prend sa place, et y joue le rôle des petits plus et des petits moins. - 278 - Les étoiles sont réelles, intégralement réelles, en principe, il n'y a chez elles absolument rien qui soit de l'ordre d'une altérité à elles-mêmes, elles sont purement et simplement ce qu'elles sont. [Dans la mesure où elles sont reconnaissables comme telles, toujours à la même place ; dans la mesure donc du symbolique.] - 375 - l'instinct de mort n'est que le masque de l'ordre symbolique, en tant (...) qu'il est muet, cad en tant qu'il n'est pas réalisé. - un ordre symbolique en gésine. - 315 - Ce n'est d'ailleurs pas le pénis, mais le phallus, cad quelque chose dont l'usage symbolique est possible parce qu'il se voit, qu'il est érigé. De ce qui ne se voit pas, de ce qui est caché, il n'y a pas d'usage symbolique [imaginaire ?] possible. - 370 - La réalisation symbolique du sujet, qui est toujours création symbolique, c'est la relation qui va de A à S . - 371 - [Mais] Pour tous les sujets humains qui existent, le rapport entre le A et le S passera toujours par l'intermédiaire de ces substrats imaginaires que sont le moi et l'autre et qui constituent les fondations imaginaires de l'objet - L'imaginaire est ainsi dans la position d'interrompre, de hacher, de scander ce qui passe au niveau du circuit. - 373 - Dire qu'il y a NEVROSE, dire qu'il y a un refoulé, qui ne va jamais sans retour, c'est dire que quelque chose du discours ["fondamental"] qui va de A à S passe et en même temps ne passe pas.

1955/56 - Les psychoses - 101 - L'important est de voir en quoi cela répond à la demande, faite de biais d'intégrer ce qui a surgi dans le réel, et qui représente pour le sujet ce quelque chose de lui-même qu'il n'a jamais symbolisé. [Donc, le délire serait une tentative de symboliser ce qui ne l'a jamais été, et qui revient dans le réel, soit 1 réponse à l'hallucination ?] Une exigence de l'ordre symbolique, pour ne pouvoir être intégrée dans ce qui a déjà été mis en jeu dans le mouvement dialectique sur lequel a vécu le sujet, entraîne une désagrégation en chaîne, une soustraction de la trame dans la tapisserie, qui s'appelle un délire. - 168 - la réalité est marquée d'emblée de la néantisation symbolique. [cf. "la paix du soir"] - 169 - L'être humain n'est pas (...) simplement immergé dans un phénomène comme celui de l'alternance du jour et de la nuit. L'être humain pose le jour comme tel, et comme ça le jour vient à la présence du jour - sur un fond qui n'est pas un fond de nuit concrète, mais d'absence possible de jour, où la nuit se loge, et inversement d'ailleurs. Le jour et la nuit sont très tôt codes signifiants, et non pas des expériences. Ils sont des connotations, et le jour empirique et concret n'y vient que comme corrélatif imaginaire, à l'origine, très tôt. - 199 - Là où il n'y a pas de matériel symbolique, il y a obstacle, défaut, à la réalisation de l'identification essentielle à la réalisation de la sexualité du sujet. - 202 - [Or par ailleurs, c'est bien parce que le symbolique règle tout, mais parce qu'il est également synonyme de castration (incomplétude) que le sujet est amené à se poser la question névrotique (le symbolique est la condition de la névrose) : car malgré la "valeur explicative fondamentale" du signifiant] Il y a tout de même une chose qui échappe à la trame symbolique , c'est la procréation dans sa racine essentielle - qu'un être naisse d'un autre. La procréation est, dans l'ordre symbolique, couverte par l'ordre instauré de cette succession entre les êtres. Mais le fait de leur individuation, le fait qu'un être sorte d'un être, rien ne l'explique dans le symbolique. Tout le symbolique est là pour affirmer que la créature n'engendre pas la créature, que la créature est impensable sans une fondamentale création. [Mais la création - qui va du signifiant à la réalité - est bien, comme telle, de l'ordre du symbolique, c'est pour cela qu'il ne l'explique pas.] - Il y a en effet quelque chose de radicalement inassimilable au signifiant. C'est tout simplement l'existence singulière du sujet. - Le signifiant est incapable de lui donner la réponse, pour la bonne raison qu'il le met justement au-delà de la mort. Le signifiant le considère comme mort. - [Ambiguïté ici entre S (mort/inexistence) et A (mort/existence)] Comme telle, la question de la mort est un autre mode de la création névrotique de la question, son mode obsessionnel. [qu'est-ce qu'une femme, donnant la vie, donnant la mort ?] - 215 - l'hystérie est une question centrée autour d'un signifiant qui reste énigmatique quant à sa signification. La question de la mort [obsession], celle de la naissance [hystérie], sont en effet les deux dernières qui n'ont justement pas de solution dans le signifiant. C'est ce qui donne au névrosés leur valeur existentielle. - L'hystérique se la pose de tout son être - comment peut-on ou être mâle ou être femelle ? Ce qui implique bien que l'hystérique en a tout de même la référence - avec son identification fondamentale à l'individu du sexe opposé au sien, par où son propre sexe est interrogé. A la façon hystérique de questionner ou... ou..., s'oppose la réponse de l'obsessionnel, la dénégation, ni...ni..., ni mâle, ni femelle.

1956/57 - La relation d'objet - 470 - [cf. la parabole des "lions"] C'est parce que les hommes ne savent pas beaucoup mieux compter que le lion, à savoir que ce nombre trois n'est jamais complètement intégré, qu'il est seulement articulé, que le conflit existe, parce que le lion bien entendu, le maintien de la relation duelle fondamentalement animale, ne continue pas moins à prévaloir dans une certaine zone [zoone...], celle précisément de l'imaginaire. (...) Si ce n'était pas si difficile d'arriver jusqu'à articuler le nombre trois, il n'y aurait pas ce gap entre le pré-œedipien et l'œdipien. - 626 - [Le MYTHE :] il est en somme la façon de faire face à une situation IMPOSSIBLE par l'articulation successive de toutes les formes d'impossibilité de la solution. (...) Le circuit étant accompli, quelque chose est réalisé qui signifie que le sujet s'est mis au niveau de la question. - 627 - [Et Lacan ajoute] c'est en cela que Hans est un névrosé et pas un pervers [pas un fétichiste : sur l'écran ou le voile de la petite culotte, Hans aurait pu peindre ce qu'il aurait voulu, mais Hans n'est pas pervers, il pose la question en "métaphysicien" comme dit Lacan, ] c'est-à-dire au point où il y a quelque chose qui manque. [C'est d'ailleurs bien la fonction du signifiant que de] compléter les béances d'une signification qui ne signifie rien ["toutes les solutions possibles" : signifiants]. - 652 - [fantasme des deux girafes] (...) une symbolisation du phallus maternel [la petite girafe], c'est à savoir que c'est le terme IMAGINAIRE [et non le terme réel que veut lui faire entendre le père et Freud] qui va devenir pour lui l'élément symbolique (...).

1957 - D'une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose - 552 - C'est (...) par la béance qu'ouvre cette prématuration dans l'imaginaire et où foisonnent les effets du stade du miroir, que l'animal humain est capable de s'imaginer mortel, non qu'on puisse dire qu'il le pourrait sans sa symbiose avec le symbolique, mais plutôt que sans cette béance qui l'aliène à sa propre image, cette symbiose avec le symbolique n'aurait pu se produire, où il se constitue comme sujet à la mort.

1957/58 - Les formations de l'inconscient - 22/01/58 - [le NdP] c'est une nécessité de la chaîne signifiante comme telle [ce qui la fait exister, tenir, ou non]; du fait que vous instituez un ordre symbolique, quelque chose répond ou non à cette fonction définie par le nom du père, et à l'intérieur de cette fonction, vous y mettez les significations qui peuvent être différentes selon les cas, mais qui, en aucun cas, ne dépendent d'une autre nécessité que de la nécessité de la fonction du père, qu'occupe le nom du père dans la chaîne signifiante. - [il représente] l'existence de la chaîne signifiante comme telle ; en ce qu'il se place, si je puis dire, au-dessus de la chaîne signifiante, dans une position métaphorique - 16/04/58 - La demande est liée d'abord et avant tout à ce quelque chose qui est dans les prémisses mêmes du langage, à savoir dans l'existence d'un appel qui est à la fois principe de la présence et terme qui permet de la repousser, jeu de la présence et de l'absence - La dialectique première n'est pas de l'objet partiel de la mère sein, ou de la mère nourriture, ou de la mère objet total - l'objet dont il s'agit c'est la parenthèse symbolique de cette présence à l'intérieur de laquelle il y a la somme de tous les objets qu'elle peut apporter, qui fait que cette parenthèse symbolique est d'ores et déjà plus précieuse qu'aucun bien, et qu'un des bien qu'elle contient, ne peut en lui-même et à lui tout seul satisfaire à ce qui est l'appel de la présence (...) [sinon à] écraser si l'on peut dire le principe de cet appel - dans l'objet de la présence, la dimension du masque apparaît [parce que le masque masque précisément, ou contient virtuellement tout ce que cette présence contient] - [Par ailleurs, c'est par la présence, en tant qu'elle est justement au-delà de la simple satisfaction - par exemple la présence de la mère après le biberon, ou bien hors de tout contexte semblable -, cad] contient en lui [l'enfant] l'accord de son désir, que le rire se produit et que la présence familière (...) est là appelée, appréhendée - [Le rire exprime] ce dont il s'agit quand la demande vient ici à bon port, à savoir au-delà du masque, (...) non pas la satisfaction mais le message de cette présence - à la façon dont le sujet accuse qu'il a bien devant lui la source de tous les biens, ici éclate assurément le rire - Le rire répond aussi bien d'ailleurs à tous ces jeux maternels qui sont les premiers exercices dans lesquels lui est apporté la modulation, l'articulation comme telle. - [Le désir étant à proprement parlé lié à un signifiant, dans l'occasion le signifiant de la présence] l'identification est très exactement le corrélatif de ce rire, car l'opposé du rire bien entendu n'est pas les pleurs. Les pleurs expriment la colique, expriment le besoin, les pleurs ne sont pas une communication, les pleurs sont une expression. Mais le rire, pour autant que je suis forcé de l'articuler pourquoi, est une communication - [le contraire du rire c'est simplement] le contraire, on ne rit plus, on est sérieux comme un pape ou comme un papa -

1958/59 - Le désir et son interprétation - 03/06/59 - [le "fort-da"] ce qui s'exprime est juste avant l'apparition du S barré, cad le moment où le sujet s'interroge par rapport à l'autre en tant que présent ou absent. C'est donc le lieu par lequel le sujet entre à ce niveau dans le symbolique -