Science

1932 - Thèse - 311 - [nécessité d'aborder] la psychose prise dans sa totalité - 313 - Le point de vue du social [nous offre] une double prise scientifique : dans les armatures mentales de compréhension qu'il engendre en fait, il offre une armature conceptuelle communicable ; dans les interactions phénoménales qu'il présente, il offre des faits qui ont tous les propriétés du quantifiable - 314 - [à la recherche d'un] déterminisme, qui soit spécifique de ces phénomènes - Ce déterminisme, nous l'avons appelé psychogénique . Cette hypothèse mérite le nom de postulat - en tout point homologue des postulats qui fondent en droit toute science - [p.315 : à cette science positive, Lacan ajoute la possibilité d'une science gnoséologique, qui serait la "phénoménologie de la personnalité"]

1936 - Au-delà du principe de réalité - 75 - Cette théorie [l'associationnisme] est fondée sur deux concepts : l'un mécaniste, celui de l'engramme , l'autre tenu fallacieusement pour donné dans l'expérience, celui de la liaison associative du phénomène mental. Le premier est une formule de recherche (...) pour désigner l'élément psycho-physique - [le second] est fondé sur l'expérience des réactions du vivant (...) particulièrement celui qui suppose donnée la forme mentale de la similitude - Ainsi est introduit dans le concept explicatif le donné même du phénomène qu'on entend expliquer [pétition de principe]. - 76 - On dénoncera le vice théorique de l'associationnisme, si l'on reconnaît dans sa structure la position du problème de la connaissance sous le point de vue philosophique. - [à savoir, depuis Locke] l'ambiguïté d'une critique qui (…) réduit l'action du réel au point de contact de la mythique sensation pure , cad à n'être que le point aveugle de la connaissance, puisque rien n'y est reconnu - 78 - [conséquence] l'image, selon l'esprit du système, étant considérée comme une sensation affaiblie dans la mesure où elle témoigne moins sûrement de la réalité, est tenue pour l'écho et l'ombre de la sensation, de là, identifiée à sa trace, à l'engramme. - [a fortiori l'hallucination est-elle tenue pour l'erreur suprême des sens] - Ainsi aux phénomènes psychiques n'est reconnue aucune réalité propre : ceux qui n'appartiennent pas à la réalité vraie n'ont de réalité qu'illusoire [sentiments, rêves, délires, etc.]. Cette réalité vraie est constituée par le système des références qui vaut pour la science déjà établie - [or] C'est en tant qu'elle est [justement] fonction de cette vérité que cette psychologie n'est pas une science. - 80 - C'est un point de vue semblable en effet qui impose au médecin cet étonnant mépris de la réalité psychique - Mais c'est parce que c'est chez le médecine, c'est-à-dire chez le praticien par excellence, que ce point de vue apparaît de la façon la plus flagrante comme une négation systématique, c'est aussi d'un médecin que devait venir la négation du point de vue lui-même. Non pojt la négation purement critique qui vers la même époque fleurit en spéculation sur les "données immédiates de la conscience", mais une négation efficace en ce qu'elle s'affirmait en une positivité nouvelle. Freud fit ce pas fécond : sous doute parce qu'(...) il y fut déterminé par son souci de guérir - 79 - Nous ne jouons pas au paradoxe de dénier que la science n'ait pas à connaître de la vérité. Mais n'oublions pas que la vérité est une valeur qui répond à l'incertitude dont l'expérience vécue de l'homme est phénoménologiquement marquée - la vérité dans sa valeur spécifique reste étrangère à l'ordre de la science. - peut-on dire que le savant se demande si l'arc-en-ciel, par exemple, est vrai ? seulement lui importe que ce phénomène soit communicable en quelque langage (condition de l'ordre mental ), enregistrable sous quelque forme (condition de l'ordre expérimental ) et qu'il parvienne à l'insérer dans la chaîne des identifications symboliques où sa science unifie le divers de son objet propre (condition de l'ordre rationnel ).

1953 - Fonction et champ de la parole… - 164 - La psy a joué un rôle dans la direction de la subjectivité moderne et elle ne saurait le soutenir sans l'ordonner au mouvement qui dans la science l'élucide. C'est là le problème des fondements qui doivent assurer à notre discipline sa place dans les sciences : problème de formalisation, à la vérité fort mal engagé. - Ce nouvel ordre ne signifie rien d'autre qu'un retour à une notion de la science véritable qui a déjà ses titres inscrits dans une tradition qui part du Théétète . Cette notion s'est dégradée, on le sait, dans le renversement positiviste qui, en plaçant les sciences de l'homme au couronnement de l'édifice des sciences expérimentales, les y subornne en réalité. Cette notion provient d'une vue erronée de l'histoire de la science, fondée sur le prestige d'un développement spécialisé de l'expérience. - 165 -La forme de mathématisation où s'inscrit la découverte du phonème comme fonction des couples d'opposition formée par les plus petits éléments discriminatifs saisissables de la sémantique, nous mène aux fondements mêmes où la dernière doctrine de Freud désigne, dans une connotation vocalique de la présence et de l'absence, les sources subjectives de la fonction symbolique. - Dès lors il est impossible de ne pas axer sur une théorie générale du symbole une nouvelle classification de sciences où les sciences de l'homme reprennent leur place centrale en tant que sciences de la subjectivité. - 166 - Ici n'apparaît plus recevable l'opposition qu'on tracerait des sciences exactes à celles pour lesquelles il n'y a pas lieu de décliner l'appellation de conjecturales : faute de fondement pour cette opposition. Car l'exactitude se distingue de la vérité, et la conjecture n'exclut pas la rigueur. Et si la science expérimentale tient des mathématiques son exactitude, son rapport à la nature n'en reste pas moins problématique. - 167 - Car la science expérimentale n'est pas tant définie par la quantité à quoi elle s'applique en effet, que par la mesure qu'elle introduit dans le réel. Comme il se voit pour la mesure du temps sans laquelle elle serait impossible. - Mais la MATHÉMATIQUE peut symboliser un autre temps, notamment le temps intersubjectif qui structure l'action humaine, dont la théorie des jeux, dite encore stratégie (...) commence à nous livrer les formules.

1954/55 - Le moi dans la théorie de Freud... - 26 - Le but et le paradoxe du Ménon est de nous montrer que l'épistémè [est] le savoir lié par une cohérence formelle. - 27 - une certaine cohérence du discours. - 28 - [qui suppose l'intervention de la parole:] nous touchons là du doigt le clivage du plan de l'imaginaire, ou de l'intuitif - où fonctionne en effet la réminiscence, cad le type, la forme éternelle, ce qu'on peut appeler aussi les intuitions a priori - et de la fonction symbolique qui n'y est absolument pas homogène, et dont l'introduction dans la réalité constitue un forçage. - 29 - C'est justement dans la confusion des deux plans que gît l'erreur, l'erreur de croire que ce que la science constitue par l'intervention de la fonction symbolique était là depuis toujours, que c'est donné. / Cette erreur existe dans tout savoir, pour autant qu'il n'est qu'une cristallisation de l'activité symbolique, et qu'une fois constitué, il l'oublie. Il y a dans tout savoir une fois constitué une dimension d'erreur, qui est d'oublier la fonction créatrice de la vérité sous sa forme naissante. - Mais nous autres analystes, nous ne pouvons l'oublier, qui travaillons dans la dimension de cette vérité à l'état naissant. - 31 - un type comme Socrate sera mis out parce qu'il est un peu trop sorti de la société des gentlemen . A force d'épistémè , il loupe l'orthodoxa [le savoir constitué, la "bonne croyance" ou opinion vraie] - 342 - c'est quelque chose qu'on retrouve à la même place, qu'on n'ait pas été là ou qu'on y ait été. - Les sciences exactes ont assurément le plus grand rapport avec cette fonction du réel. - les sciences exactes ne font pas autre chose que de lier le réel à une syntaxe.

1955/56 - Les psychoses - 77 - La notion que le réel, si délicat qu'il soit à pénétrer, ne peut pas jouer au vilain avec nous, ne nous mettra pas dedans exprès, est, encore que personne ne s'y arrête absolument, essentiel à la constitution du monde de la science. -

1955 - Variantes de la cure-type - 361 - C'est que l'analyse, de progresser essentiellement dans le non-savoir, se rattache, dans l'histoire de la science, à son état d'avant sa définition aristotélicienne et qui s'appelle la dialectique.

1956 - Situation de la psychanalyse et formation du psychanalyste en 1956 - 472 - [la psy comme science conjecturale] car la conjecture n'est pas l'improbable : la stratégie peut l'ordonner en certitude. De même le subjectif n'est-il pas la valeur de sentiment avec quoi on le confond : les lois de l'intersubjectivité sont mathématiques.

1959/60 - L'éthique de la psychanalyse - 157 - Quant à l'incroyance [par ex. le discours de la science] (...) la Chose est rejetée au sens propre de la Verwerfung . - De même que dans l'ART il y a une Verdrangung , un refoulement de la Chose - que dans la religion il y a peut-être une Verschiebung - c'est à proprement parler de la Verwerfung qu'il s'agit dans le discours de la science. Le discours de la science rejette [forclusion] la présence de la Chose, pour autant que, dans sa perspective, se profile l'idéal du savoir absolu, cad de quelque chose qui pose tout de même la Chose tout en n'en faisant pas état. - Le discours de la science est déterminé par cette Verwerfung , et c'est probablement pourquoi - ce qui est rejeté du symbolique reparaissant, selon ma formule, dans le réel - il se trouve déboucher sur une perspective où c'est bien quelque chose d'aussi énigmatique que la Chose qui se profile, au terme de la physique [le nucléaire ?]. - 276 - Pour nous, dans le discours de la communauté, du bien en général, nous avons affaire aux effets d'un discours de la science où se montre pour la première fois dévoilée la puissance du signifiant comme tel. - une aliénation supplémentaire. - 277 - En quoi ? En ceci que c'est un discours qui, par structure, n'oublie rien. [mathématiques] C'est en cela qu'il se différencie du discours de la mémorisation première qui se poursuit en nous à notre insu, du discours mémorial de l'ics dont le centre est absent, dont la place est située par le il ne savait pas qui est proprement le signe de cette omission fondamentale où le sujet vient se situer.

1961/62 - L'identification - 27/06/62 - cet objet de la castration ["a"], c'est l'objet même par quoi nous nous situons dans le champ de la science, je veux dire que c'est l'objet de notre science comme le nombre ou la grandeur peuvent être l'objet de la mathématique

1962/63 - L'angoisse - 29/11/61 - le propre de notre science - je dis de la science qui existe depuis deux siècles parmi nous - laisse ouverte la question que j'ai appelée tout à l'heure le cosmisme [cosmos] de l'objet.

1964 - Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse - 12 - le terme de recherche, je m'en méfie. Pour moi, je ne me suis jamais considéré comme un chercheur. Comme l'a dit un jour Picasso (...) - Je ne cherche pas, je trouve. - Aussi bien, y a-t-il sans doute quelque affinité entre la recherche qui cherche et le registre religieux. Il s'y dit couramment - Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais déjà trouvé. Le déjà trouvé est toujours derrière, mais frappé par quelque chose de l'ordre de l'oubli. N'est-ce pas ainsi une recherche complaisante, indéfinie, qui s'ouvre alors ? - [Dans les sciences humaines] on y voit surgir, sous les pas de quiconque trouve, ce que j'appelerai la revendication herméneutique, qui est justement celle qui cherche - qui cherche la signification toujours neuve et jamais épuisée, mais menacée d'être coupée en herbe par celui qui trouve. -13 - Ce qui spécifie une science, c'est d'avoir un objet. On peut soutenir qu'une science est spécifiée par un objet défini, au moins, par un certain niveau d'opération, reproductible, qu'on appelle expérience. Mais nous devons être très prudent, parce que cet objet change, et singulièrement, au cours de l'évolution d'une science. - Je ne retiens pas l'exigence de Duhem que toute science se réfère à un système unitaire, dit système du Monde - référence en somme plus ou moins idéaliste, puisque référence au besoin d'identification. J'irais même jusqu'à dire que nous pouvons nous passer du complément transcendant implicite dans la position du positiviste, lequel se réfère toujours à une unité de tous les champs. - 14 - la pureté de l'âme [de l'alchimiste] de l'opérateur (...) était un élément essentiel en l'affaire. - c'est peut-être ça que cherche notre psychanalyse didactique [en tout cas il en va du désir de l'analyste et plus largement du désir de l'homme de science. S'il faut un certain objet à la science (cf.), sans lui faut-il reconnaître un certain sujet.] - 210 - [La démarche cartésienne] Elle est au principe de quelque chose qui n'est pas la science au sens où, depuis Platon et avant, elle a fait l'objet de la méditation des philosophes - mais La science - l'accent étant mis sur ce La et non sur le mot science? La science, celle dans laquelle nous sommes pris, qui forme le contexte de notre action à tous dans le temps que nous vivons [actuel], et à laquelle ne peut pas échapper le psychanalyste lui-même, parce qu'elle fait, à lui aussi, partie de ses conditions, c'est La science, celle-là. [psychanalyse] - 238 - C'est pour autant que la science élide, élude, sectionne, un champ déterminé dans la dialectique de l'aliénation du sujet, c'est pour autant que la science se situe au point précis que je vous ai défini comme celui de la séparation, qu'elle peut soutenir aussi le mode d'existence du savant, de l'homme de science. - Ce corps de la science, nous n'en concevrons la pensée qu'à reconnaître qu'il est, dans la relation subjective, l'équivalent de ce que j'ai appelé ici l'objet petit "a". - 239 - l'analyse n'est pas une religion. Elle procède du même statut que La science [au sens moderne]. Elle s'engage dans le manque central où le sujet s'expérimente comme désir.