Hystérie

1955/56 - Les psychoses - 193 - la femme s'interroge sur ce que c'est qu'être une femme, de même que le sujet mâle s'interroge sur ce que c'est qu'être une femme. - 197 - [Cette notion d'identification est primordiale dans l'analyse. Freud se trompe sur Dora car] Il se demande ce que Dora désire, avant de se demander qui désire dans Dora. Et Freud finit par s'apercevoir que, dans ce ballet à quatre (...) c'est Madame K. l'objet qui intéresse vraiment Dora, en tant qu'elle-même est identifiée à Monsieur K. La question de savoir où est le moi de Dora est ainsi résolue - le moi de Dora, c'est Monsieur K. - 196 - La topique freudienne du moi nous montre comment [un ou une névrosée] (...) use de son moi pour poser la question, cad justement pour ne pas le poser. La structure d'une névrose est essentiellement une question - 200 - Devenir une femme et s'interroger sur ce qu'est une femme sont deux choses essentiellement différentes. Je dirai même plus - c'est parce qu'on ne le devient pas qu'on s'interroge, et jusqu'à un certain point, s'interroger est le contraire de la devenir. - 201 - Quand sa question prend forme sous l'aspect de l'hystérie, il est très facile à la femme de la poser par la voie la plus courte, à savoir l'identification au père. - 198 - la raison de la dissymétrie se situe essentiellement au niveau symbolique - Il n'y a pas à proprement parler, dirons-nous, de symbolisation du sexe de la femme comme tel. - L'accès de la femme au complexe œdipien, son identification imaginaire [finalement en tant que femme], se fait en passant par le père, exactement comme chez le garçon, en raison de la prévalence de la forme imaginaire du phallus - 199 - [Mais] Le fait ne peut s'interpréter que dans la perspective où c'est l'ordonnance symbolique qui règle tout. - 199 - Là où il n'y a pas de matériel symbolique, il y a obstacle, défaut, à la réalisation de l'identification essentielle à la réalisation de la sexualité du sujet. - 202 - [Or par ailleurs, c'est bien parce que le symbolique règle tout, mais parce qu'il est également synonyme de castration (incomplétude) que le sujet est amené à se poser la question névrotique (le symbolique est la condition de la névrose) : car malgré la "valeur explicative fondamentale" du signifiant] Il y a tout de même une chose qui échappe à la trame symbolique , c'est la procréation dans sa racine essentielle - qu'un être naisse d'un autre. La procréation est, dans l'ordre symbolique, couverte par l'ordre instauré de cette succession entre les êtres. Mais le fait de leur individuation, le fait qu'un être sorte d'un être, rien ne l'explique dans le symbolique. Tout le symbolique est là pour affirmer que la créature n'engendre pas la créature, que la créature est impensable sans une fondamentale création. [Mais la création - qui va du signifiant à la réalité - est bien, comme telle, de l'ordre du symbolique, c'est pour cela qu'il ne l'explique pas.] - Il y a en effet quelque chose de radicalement inassimilable au signifiant. C'est tout simplement l'existence singulière du sujet. - Le signifiant est incapable de lui donner la réponse, pour la bonne raison qu'il le met justement au-delà de la mort. Le signifiant le considère comme mort. - [Ambiguïté ici entre S (mort/inexistence) et A (mort/existence)] Comme telle, la question de la mort est un autre mode de la création névrotique de la question, son mode obsessionnel. [qu'est-ce qu'une femme, donnant la vie, donnant la mort ?] - 215 - l'hystérie est une question centrée autour d'un signifiant qui reste énigmatique quant à sa signification. La question de la mort [obsession], celle de la naissance [hystérie], sont en effet les deux dernières qui n'ont justement pas de solution dans le signifiant. C'est ce qui donne au névrosés leur valeur existentielle. - L'hystérique se la pose de tout son être - comment peut-on ou être mâle ou être femelle ? Ce qui implique bien que l'hystérique en a tout de même la référence - avec son identification fondamentale à l'individu du sexe opposé au sien, par où son propre sexe est interrogé. A la façon hystérique de questionner ou... ou..., s'oppose la réponse de l'obsessionnel, la dénégation, ni...ni..., ni mâle, ni femelle.

1956/57 - La relation d'objet - 8 - l'hystérique est quelqu'un qui aime par procuration - quelqu'un dont l'objet est homosexuel et qui aborde cet objet homosexuel par identification avec quelqu'un de l'autre sexe [puisqu'elle s'identifie au pénis imaginaire] - Dora est une hystérique (...) : c'est que son père à elle, contrairement au père de l'homosexuelle [qui s'identifie, elle, franchement au père imaginaire], est impuissant - [schémas p. 104-105] - [L'hystérique reste bloquée à ce stade où, normalement la petite fille joue à la maman protectrice, cad mère phallique, mère-au-pénis, avec l'enfant que lui donne le père à défaut d'autre chose. L'H en reste là, parce qu'en l'occurrence, elle dénie l'impuissance du père. Dénégation qui est l'effet de l'amour que, compensatoirement, la fille éprouve pour le père d'autant plus qu'il est impuissant (rappelons-nous que la cause de l'amour est le manque, ce que l'on ne peut donner)]

1957 - La psychanalyse et son enseignement - 452 - Car cet autre réel, elle ne peut le trouver que de son propre sexe, parce que c'est dans cet au-delà qu'elle appelle ce qui peut lui donner corps, ce pour n'avoir pas su prendre corps en-deça. Faute de réponse de cet autre, elle lui signifiera une contrainte par corps en le faisant saisir par les offices d'un homme de paille, substitut de l'autre imaginaire en qui elle s'est moins aliénée qu'elle n'est restée devant lui en souffrance. / C'est ainsi que l'hystérique s'éprouve dans les hommages adressés à une autre, et offre la femme en qui elle adore son propre mystère à l'homme dont elle prend le rôle sans pouvoir en jouir [pas de l'homme, du rôle].

1957/58 - Les formations de l'inconscient - 09/04/58 - [le désir hystérique est un désir fondamentalement insatisfait] on peut dire que l'hystérique est suspendue à cette première étape, à ce clivage nécessaire (...) entre la demande et le désir. - [Cf. le rêve de la belle bouchère] - Cette malade très éprise de son mari, que demande-t-elle ? C'est l'amour, et les hystériques comme tout le monde, à ceci près que chez elles c'est plus encombrant - Que désire-t-elle ? Elle désire du caviar. - Et que veut-elle ? Elle veut qu'on ne lui donne pas de caviar. [comme son amie, à qui elle s'identifie, pour ne pas grossir et ainsi satisfaire son mari]. - elle veut qu'il ne lui donne pas de caviar pour qu'on puisse continuer à s'aimer à la folie, cad à se taquiner, se faire des misères à perte de vue. - Le désir dont le sujet fait état, c'est aussi [donc] le désir préféré [mais interdit] de l'autre, et même il ne lui reste que cela au moment où elle ne va pas pouvoir donner un dîner - En d'autres termes, c'est pour autant que le désir de l'autre est barré, qu'il [le sujet] va reconnaître son désir barré, son désir insatisfait à lui - l'hystérie dans le rapport de l'homme au signifiant, est une structure tout à fait primordiale - cad qu'il y a quelque chose toujours qui reste au-delà de ce qui peut se satisfaire [bien que l'hystérique refuse en même temps cette satisfaction] - 07/05/58 - s'il faut que ce que l'on n'est pas [le phallus] soit ce qu'on est [dans l'hystérie], il reste à ne pas être [à (ne pas) être sans l'avoir] ce que l'on est [vraiment], c'est-à-dire ce que l'on est à le repousser dans le paraître, ce qui est très exactement ce qui est la position de la femme dans l'hystérie. En tant que femme elle se fait masque, elle se fait masque précisément pour derrière ce masque, être le phallus - 21/05/58 - c'est pour autant qu'elle ou qu'il reconnaît chez un autre (...) les incises si l'on peut dire de son désir, à savoir qu'elle ou qu'il est devant le même problème de désir qu'elle ou que lui, que se produit l'identification, et toutes les formes de contagion, de crise, d'épidémie, de manifestation symptomatique - 18/06/58 - la dimension qu'on peut appeler la dimension de l'hystérie latente à toute espèce d'être humain dans le monde, à savoir tout ce qui peut se présenter comme question sur son propre désir.

1958 - La signification du phallus - 694 - c'est pour être le phallus, cad le signifiant du désir de l'Autre, que la femme va rejeter une part essentielle de la féminité, nommément tous ses attributs dans la mascarade. - 695 - Le fait que la féminité trouve son refuge dans ce masque (...) a la curieuse conséquence de faire que chez l'être humain la parade virile elle-même paraisse féminine.

1960/61 - Le transfert - 288 - Il est bien vrai que, d'une certaine façon, M. K. est l'objet petit a, et qu'à la vérité, c'est bien là le fantasme, pour autant que le fantasme est le support du désir. Mais Dora ne serait pas une hystérique si ce fantasme, elle s'en contentait. Elle vise autre chose, elle vise à mieux, elle vise grand A. Elle vise l'Autre absolu. - Mme K. est pour elle l'incarnation de cette question, qu'est-ce qu'une femme ? Et à cause de cela, au niveau du fantasme, il ne se produit pas le rapport de fading du sujet au petit a, mais autre chose, parce qu'elle est hystérique. - [donc elle vise l'Autre absolu] - Et elle ne peut pas faire qu'elle n'y rencontre, sans le savoir, le signe F [grand Phi] qui y répond, parfaitement clos, toujours voilé. Et c'est pour cela qu'elle recourt à toutes les formes de substitut (...) en glissant, là où il le faut , le [petit phi] du phallus imaginaire. Son père est impuissant avec Mme K ? Eh bien, qu'importe, c'est elle qui fera la copule. - 289 - C'est qu'il y a une chose qu'elle préfère à son désir - elle préfère que son désir soit insatisfait à ceci, que l'Autre garde la clé de son mystère. [désir de savoir] - c'est pour cela que, s'identifiant au drame de l'amour [l'amour y devient métaphore du désir], elle s'efforce, cet Autre, de le réanimer, (...) de le réparer. [formule du fantasme de l'hystérique : petit a sur moins phi, poinçon [désire] grand A. - moins phi = sa propre castration imaginaire, cachée mais opérante]

1961/62 - L'identification - 20/06/62 - [3è identification où] le sujet se constitue comme désir - le désir de l'homme se situe au lieu de l'Autre - [comme il apparaît clairement pour l'hystérique, au point que l'on peut donner à cette identification le nom d'id. hystérique.]