Hallucination

1933 - Sur le problème des hallucinations - [D'après H. Maier] Il faut désormais étudier l'hallucination non comme un phénomène isolé ou comme une entité psychologique, mais dans ses rapports avec la PERSONNALITÉ totale et les altérations de celle-ci. [Maier distingue 1) les h catathymiques (= formation des complexes associatifs sous l'influence de facteurs affectifs) ou psychogènes, 2) les h à la fois catathymiques et organiques (psychogènes quant au contenu, mais résulte d'un affaiblissement pathologique du système nerveux), 3) les h d'origine toxique, intoxications [creuser par ailleurs le concept d'infection] exogènes (alcool etc) ou endogènes (délire uréliques, etc) - Sur le problème des hallucinations - l'hallucination est (...) essentiellement croyance en l'objet sans l'objet, fondée sur une perception (...) ou sans perception - On opposera aux hallucinations ainsi définies les HALLUCINOSES comme des symptômes sensoriels isolés, ayant fréquemment un caractère perceptif, mais sans croyance en la réalité de l'objet, sans DÉLIRE. Or, l'hallucinose se manifeste en clinique comme ayant un rapport symptomatique direct avec une lésion neurologique.

1954 - Réponse au commentaire de Jean Hyppolite... - 391 - On pourrait dire que le sentiment du déja vu vient à la rencontre de l'hallucination erratique, que c'est l'écho imaginaire qui surgit en réponse à un point de la réalité qui appartient à la limite où il a été retranché du symbolique. - 392 - [Bien différent le phénomène hallucinatoire] à se heurter au symbole qu'il a à l'origine retranché de sa Bejahung . Car ce symbole ne rentre pas pour autant dans l'imaginaire [comme précédemment ; d'où une opposition frontale réel/symbolique]. Il constitue, nous dit Freud, ce qui proprement n'existe pas ; et c'est comme tel qu'il ek-siste - Le contenu de l'hallucination, si massivement symbolique, y doit son apparition dans le réel à ce qui n'existe pas pour le sujet. Tout indique en effet que celui-ci [le petit garçon au doigt "coupé", incapable d'en dire quelque chose] reste fixé dans son ics à une position féminine imaginaire qui ôte tout sens à sa mutilation hallucinatoire.

1955/56 - Les psychoses - 55 - Quand nous parlons de névrose, nous faisons jouer un certain rôle à une fuite, à un évitement, ou un conflit avec la réalité quelque part. - 56 - [il s'agit d'] une partie de la réalité psychique .[souligne Freud] - Cette partie est oubliée, mais continue à se faire entendre - d'une façon symbolique. - A quoi il oppose la psychose, où c'est avec la réalité extérieure qu'un moment il y a eu trou, rupture - un trou, que viendra ensuite combler le monde fantastique. - 57 - [pour expliquer la pièce rapportée du fantasme psychotique] Nous avons à notre disposition le mécanisme de la projection. - [Mais qui ne convient pas vraiment] - Bien plutôt nous devons dire que ce qui est rejeté (...) revient de l'extérieur . - 59 - [Ex. Je viens de chez le charcutier [pour dire : "cochon!"]. Réponse du berger à la bergère : Truie . Or ce n'est justement pas le même message sous sa forme inversée, comme il est patent dans la parole, qui va de a à A . Ici c'est son propre message, qui va de a à a' .] - 62 - Qui est-ce qui parle ? Puisqu'il y a hallucination, c'est la réalité qui parle. [soit petit a . Car ] quand l'Autre avec un grand A parle, ce n'est pas purement et simplement la réalité devant laquelle vous êtes, à avoir l'individu qui articule. L'Autre est au-delà de cette réalité. - 63 - En d'autres termes, quand une marionnette parle [ce qu'est tout individu, comme tel], ce n'est pas elle qui parle, c'est quelqu'un derrière.- [Ici] Notre patiente ne dit pas quelqu'un d'autre derrière lui qui parle - sa propre parole est dans l'autre qui est elle-même - Truie est donné du tac au tac, et on ne sait plus quel est le premier tac. / Que la parole s'exprime dans le réel veut dire qu'elle s'exprime dans la marionnette. - Le petit a , c'est le monsieur qu'elle rencontre dans le couloir, et il n'y a pas de grand A. petit a' , c'est ce qui dit Je viens de chez le charcutier Et de qui dit-on Je viens de chez le charcutier ? De S. Petit a lui a dit Truie . - 64 - Il n'y a que deux façons de parler ce S, de ce sujet que nous sommes radicalement, c'est - soit de s'adresser vraiment à l'Autre, grand A, et d'en recevoir le message qui vous concerne sous une forme inversée, - soit d'indiquer sa direction, son existence, sous la forme de l'allusion. Si cette femme est (...) une paranoïaque, c'est que le cycle, pour elle, comporte une exclusion du grand Autre. Le circuit se referme sur les deux petits autres - Elle parle tellement bien par allusion qu'elle ne sait pas ce qu'elle en dit. - Moi la truie, je viens de chez le charcutier, je suis déjà disjointe, corps morcelé, (...), délirante, et mon monde s'en va en morceaux, comme moi-même. - - 154 - [Le sujet entend peut-être ce qu'il articule, mais au fond c'est le cas de tout le monde. L'halluciné attribue ce discours à un Autre, à son usage.] - 160 - Ce qui signe l'hallucination, c'est ce sentiment particulier du sujet, à la limite du sentiment de réalité et du sentiment d'irréalité, sentiment de proche naissance, de nouveauté, et pas n'importe laquelle, de nouveauté à son usage faisant irruption dans le monde extérieur. Ce n'est pas du même ordre que ce qui apparaît en rapport avec la signification et la signifiance. - 156 - [Par ex.] Vous êtes au déclin d'une journée d'orage et de fatigue, vous considérez l'ombre qui commence d'envahir ce qui vous entoure, et quelque chose vous vient à l'esprit, qui s'incarne dans la formulation la paix du soir. - surpris que nous sommes par cette formulation plus ou moins endophasique, plus ou moins inspirée, qui nous vient comme un murmure de l'extérieur. - 157 - limite où le discours, s'il débouche sur quelque chose au-delà de la signification, c'est sur du signifiant dans le réel. - une certaine façon de prendre ce moment du soir comme signifiant - 158 - S'il y a quelque chose par quoi la parole vient se combiner avec une fonction vocale absolument a-signifiante, et qui contient pourtant tous les signifiants possibles, c'est bien ce qui nous fait frissonner dans le hurlement du chien devant la lune.- le hurlement est un pur signifiant [sans signification], tandis que l'appel à l'aide a une signification - 182 - la relation d'écho intérieur où le sujet est par rapport à son propre discours. - 33 - [dans l'h.] le sujet articule ce qu'il dit entendre. [ici, lorsque le sujet parle, il ne s'entend pas, au sens de se reconnaître, lui-même.] [reconnaissance]

1957 - D'une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose - 560 - [voici ce qui se produit selon Schreber dans cet] effort de réplique à quoi donc le sujet est ainsi suspendu (...) : 1. Ce qu'il appelle le miracle du hurlement (...), cri tiré de sa poitrine et qui le surprend [comme un signifiant dans le réel] au-delà de tout avertissement, qu'il soit seul ou devant une assistance horrifiée par l'image qu'il lui offre de sa bouche soudain béante sur l'indicible vide, et qu'abandonne le cigare qui s'y fixait l'instant d'avant ; 2. L'appel au secours (...), émis par des "nerfs divins détachés de la masse", et dont le ton plaintif se motive du plus grand éloignement où Dieu se retire ; (...) 3. L'éclosion prochaine (...) dans la chambre voisine, dans le couloir, de manifestations qui, sans être extraordinaires, s'imposent au sujet comme produites à son intention ; 4. L'apparition à l'échelon suivant du lointain, soit hors de la prise des sens, dans le parc, dans le réel , de créations miraculeuses, cad nouvellement créées (...) oiseaux ou insectes. / Ces derniers météores du délire n'apparaissent-ils pas comme la trace d'un sillage, ou comme un effet de frange, montrant les deux temps où le signifiant qui s'est tu dans le sujet, fait, de sa nuit, d'abord jaillir une lueur de signification à la surface du réel, puis fait le réel s'illuminer d'une fulgurance projetée du dessous de son soubassement de néant ?

1957/58 - Les formations de l'inconscient - 25/06/58 - pour le psychotique la parole de l'Autre ne passe nullement dans son ics ; l'Autre lui parle sans cesse [dans le réel], l'Autre en tant que lieu de la parole. - c'est là que ça parle, et que ça retentit de tous côtés
1958/59 - Le désir et son interprétation - 26/11/58 - si une hallucination nous pose des problèmes qui lui sont propres, c'est parce qu'il s'agit de signifiants et non pas d'images, ni de choses, ni de perceptions, enfin de fausses perceptions du réel comme on s'exprime.

1958/59 - Le désir et son interprétation - 03/12/92 - Le processus primaire signifie la présence du désir, (...) du désir là où il se présente comme le plus morcelé - Le processus primaire quand il est seul en jeu, aboutit à l'hallucination (...) par un procès de régression - C'est toujours quand [selon Freud] l'issue vers la motilité de l'incitation est pour une raison quelconque barrée - le résultat du processus primaire, c'est qu'en quelque sorte sur ce circuit quelque chose s'allume. - ceci ne répond nullement au principe du besoin, car bien entendu aucun besoin n'est satisfait par une satisfaction hallucinatoire. Le besoin exige, pour être satisfait, l'intervention du processus secondaire - [les besoins] sont soumis au principe de réalité. - En fin de compte selon Freud la réalité humaine se construit sur un fond d'hallucination préalable, lequel est l'univers du plaisir - Le processus primaire ne vise pas la recherche d'un objet nouveau, mais d'un objet à retrouver, et ceci par la voie d'une Vorstellung réévoquée, parce que (...) correspondant à un premier frayage alors que l'allumage de cette lampe donne droit à une prime (...), et c'est cela le principe de plaisir. Mais pour que cette prime soit honorée, il faut qu'il y ait une certaine réserve de sous dans la machine, et la réserve de sous dans la machine dans l'occasion elle est vouée à ce second système de processus qui s'appelle les processus secondaires. En d'autres termes, l'allumage de la lampe n'est une satisfaction qu'à l'intérieur de la convention totale de la machine en tant que cette machine est celle du joueur, à partir du moment où il joue.

1959/60 - L'éthique de la psychanalyse - 66 - En fin de compte, sans quelque chose qui l'hallucine en tant que système de référence, aucun monde de perception n'arrive à s'ordonner de façon valable, à se constituer de façon humaine. Le monde de la perception nous est donné par Freud comme dépendant de cette hallucination fondamentale [de la CHOSE ?] sans laquelle il n'y aurait aucune attention disponible.

1964 - Les quatre concepts… - 138 - La réalité de l'inconscient, c'est - vérité insoutenable - la réalité sexuelle. - 140 - nous devons considérer l'ics comme une rémanence de cette jonction archaïque de la pensée avec la réalité sexuelle. - 142 - Seule la présence du sujet qui désire, et qui désire sexuellement, nous apporte cette dimension de métaphore naturelle, d'où se décide la prétendue identité de la perception [caractérisant l'ics selon Freud]. - Ce n'est qu'en raison de la sexualisation de ces objets que l'hallucination du rêve est possible - car, vous pouvez le remarquer, la petite Anna n'hallucine que les objets interdits. - la dimension de signification est absolument essentielle à repérer dans toute hallucination pour nous permettre de saisir ce dont il s'agit dans le principe du plaisir.