Réel

1932 - Thèse - 257 - le rôle capital des fixations libidinales dans l'élaboration du monde des objets au sens le plus général. La fonction du "contact avec le réel" rentrait ainsi dans l'énergétique générale de la libido. - [tableau d'Abraham : 1) stade oral primaire : autoérotisme a-objectal = shizophrénie) 2) stade oral tardif (cannibalisme) : narcissisme primaire (fixation au corps propre comme objet) = groupe maniaque-dépressif, 3) stade sadique anal primaire : narcissisme secondaire (à la fois réincorporation au moi d'une partie de la libido, et projection sur les objets parentaux, d'où le début de formation des mécanismes autopunitifs et de surmoi (principe moral au-delà du principe de réalité) = forme pathologique : paranoïa, 4) stade sadique anal secondaire = névrose obsessionnelle, 5) Stade génital primaire (phallique) = hystérie, 6) stade d'achèvement génital : normalité] - 255 - [Lacan oppose cette conception du réel - objectal - à deux doctrines psychologiques, d'ailleurs opposées. L'une situera le trouble morbide dans la perte du sentiment du réel , cad seulement le rendement social du sujet (Janet), son efficacité dans l'action] - D'autres invoqueront encore la notion d'un contact avec la réalité , mais cette fois il s'agira d'un contact de nature vitale [contact ineffable fait d'] un échange d'effusions et d'infusions affectives avec un état du réel que l'on peut qualifier de primordial -

1953/54 - Les écrits techniques de Freud - 80 - le réel, ou ce qui est perçu comme tel, est ce qui résiste absolument à la symbolisation [symbolique]. - En fin de compte, le sentiment du réel ne se présente-t-il pas à son maximum, dans la brûlante manifestation d'une réalité irréelle, hallucinatoire ?

1954/55 - Le moi dans la théorie de Freud... - 122 - à propos de l'extériorité et de l'intériorité - cette distinction n'a aucun sens au niveau du réel. Le réel est sans fissure. - nous n'avons aucun autre moyen de l'appréhender (...) que par l'intermédiaire du symbolique. - 170 - [Selon le schéma de la Science des rêves ] [Valabrega :] "Comment expliquer l'hallucination, le rêve hallucinatoire ? Selon Freud, le seul moyen de s'en tirer est d'admettre que l'excitation, au lieu de se transmettre normalement vers l'extrémité motrice, suit une voie rétrograde. Voilà la régression." - 171 - Ce sens est appelé régrédient par opposition au sens progrédient du fonctionnement normal, éveillé, de l'appareil psychique. - 175 - Il introduit la régression à partir du moment où il met l'accent sur des facteurs temporels. Du coup, il est forcé de l'admettre aussi sur le plan topique. [Mais le schéma est d'emblée caduc.] - 195 - pour autant qu'il [le rêve] ramènerait certaines exigences psychiques à leur mode d'expression le plus primitif [hallucinatoire, imagé], qui serait situé au niveau de la perception ? - L'analyse que nous avons faite de ce qu'il y a de proprement figuratif [la bouche infectée, par ex.] dans le rêve d'Irma nous impose-t-elle une pareille interprétation ? - 196 - Il y a donc apparition angoissante d'une image qui résume ce que nous pouvons appeler la révélation du réel dans ce qu'il a de moins pénétrable, du réel sans aucune médiation possible, du réel dernier, de l'objet essentiel qui n'est plus un objet, mais ce quelque chose devant quoi tous les mots s'arrêtent et toutes les catégories échouent, l'objet d'angoisse par excellence. - Pouvons-nous parler de processus de régression pour expliquer la profonde déstructuration qui se produit alors dans le vécu du rêveur ? - 197 - Ce n'est pas d'un état antérieur du moi qu'il s'agit, mais, littéralement, d'une décomposition spectrale de la fonction du moi. Nous voyons apparaître la série des moi . - Cette décomposition spectrale est évidemment une décomposition imaginaire. - 199 - [La perception, où l'on est censé avoir"régressé", se pose d'emblée comme imaginaire, ou narcissique] - 278 - Les étoiles sont réelles, intégralement réelles, en principe, il n'y a chez elles absolument rien qui soit de l'ordre d'une altérité à elles-mêmes, elles sont purement et simplement ce qu'elles sont. [Dans la mesure où elles sont reconnaissables comme telles, toujours à la même place ; dans la mesure donc du symbolique.] - 342 - c'est quelque chose qu'on retrouve à la même place, qu'on n'ait pas été là ou qu'on y ait été. - Les sciences exactes ont assurément le plus grand rapport avec cette fonction du réel. - les sciences exactes ne font pas autre chose que de lier le réel à une syntaxe. -

1955/56 - Les psychoses - 77 - La notion que le réel, si délicat qu'il soit à pénétrer, ne peut pas jouer au vilain avec nous, ne nous mettra pas dedans exprès, est, encore que personne ne s'y arrête absolument, essentiel à la constitution du monde de la science. -

1957 - Intervention après la communication de G. Favez... - [autrui] Le mot réel veut dire ce qu'il veut dire ; chacun sait à quel point le personnage réel est quelque chose que nous rencontrons rarement, et nous le rencontrons rarement parce que nous le cherchons peu. Nous pouvons passer une vie entière à côté de quelqu'un, sans vouloir jamais connaître de lui que la fonction qu'il comble à notre endroit, (...) sans soupçonner un seul instant sa réalité de personnage réel, au sens vulgaire, et non philosophique, du mot - Faire semblant de ne rien voir, c'est la position fondamentale vis-à-vis de son semblable ; le contraire serait le comble de l'inconvenance.

1958/59 - Le désir et son interprétation - 14/01/59 - un affect fondamental comme la colère n'est pas autre chose que cela : le réel qui arrive au moment où nous avons fait une fort belle trame symbolique, où tout va fort bien, l'ordre, la loi, notre mérite et notre bon vouloir. On s'aperçoit tout d'un coup que les chevilles ne rentrent pas dans les petits trous. C'est cela le règne de l'affect de la colère - 29/04/59 - Il n'y a (...) dans le réel aucune espèce de faille ou de fissure. Tout manque est manque à sa place, mais manque à sa place est manque symbolique. - le réel, en tant que tel, se définit comme toujours plein. [il n'y a de privation réelle (trou) que d'un objet symbolique] - nous appelons cela "moins phi" (...) comme étant l'essentiel de la marque sur l'homme de son rapport au logos, cad la castration - cette connotation "moins phi" nous servira à définir (...) l'objet "a". - 27/05.59 - cet avènement du sujet au niveau de la coupure a quelque chose qu'il faut bien appeler un réel, mais qui n'est symbolisé par rien. [bien que la coupure, elle, soit d'abord symbolique, puis au niveau du fantasme] - point électif du rapport du sujet à ce que nous pouvons ici appeler son ÊTRE pur de sujet - j'ai pu définir cette fonction remplie par le fantasme comme une métonymie de l'être et identifier comme tel, à ce niveau, le désir. [coupure "pure" = sujet réel; coupure fantasme = être sujet ?] - 03/06/59 - L'être, nous dirons que c'est proprement le réel en tant qu'il se manifeste au niveau du symbolique. - Cet être il n'est nulle part ailleurs (...) que dans les intervalles, dans les coupures, et là où à proprement parler il est le moins signifiant des signifiants, à savoir la coupure. -  01/07/59 - l'objet "a", l'objet du désir, dans sa nature est un résidu, est un reste. Il est le résidu que laisse l'être auquel le sujet parlant est confronté comme tel à toute demande possible. Et c'est par là que l'objet rejoint le réel. - Je dis le réel, et non pas la réalité, car la réalité est constituée par tous les licols que le symbolisme humain, de façon plus ou moins perspicace, passe au cou du réel en tant qu'il en fait les objets de son expérience. - L'objet dont il s'agit, pour autant qu'il rejoint le réel, y participe en ceci que le réel s'y présente justement comme ce qui résiste à la demande, ce que j'appellerai l'inexorable. L'objet du désir est l'inexorable comme tel - cette forme du réel qui se présente en ceci qu'il revient toujours à la même place. Et c'est pour cela que nous en avons vu le prototype dans les astres, curieusement. - c'est à poser ceci que l'objet du désir est à définir foncièrement comme signifiant. -

1959/60 - L'éthique de la psychanalyse - 30 - Sa praxis [de l'analyse] n'est que le prélude à une action morale comme telle - ladite action étant celle par laquelle nous débouchons dans le réel.

1961/62 - L'identification - 14/03.62 - [cf. tore] [Nécessité] de définir chacun des tours comme un un, irréductiblement différent. Pour que ceci soit réel, à savoir que cette vérité symbolique, puisqu'elle suppose le comput, le comptage, soit fondé, s'introduise dans le monde, il faut et il suffit que quelque chose soit apparu dans le réel qui est le trait unaire. On comprendra que devant ce I, qui est tout ce qui donne sa réalité à l'idéel, c'est tout ce qu'il y a de réel dans le symbolique et ça suffit - aux origines de la pensée [Platon] (...) le I était le bien, le beau, le vrai, l'être suprême. - 30/05/59 - Effet de signifiant, la coupure a d'abord été, pour nous, dans l'analyse phonématique du langage, cette ligne temporelle, plus précisément successive des signifiants [chaîne signifiante]. - Mais que va-t-il arriver si maintenant je vous incite à considérer la ligne elle-même comme coupure originelle ? - Si la ligne elle-même est coupure, chacun de ses éléments sera donc section de coupure, et c'est cela en somme qui introduit cet élément vif, si je puis dire, du signifiant que j'ai appelé le huit intérieur, à savoir précisément la boucle. La ligne se recoupe : quel est l'intérêt de cette remarque ? La coupure portée sur le réel y manifeste, dans le réel, ce qui est sa caractéristique et sa fonction, et ce qu'il introduit dans notre dialectique, contrairement à l'usage qui en est fait que le réel est le divers, le réel, depuis toujours, je m'en suis servi de cette fonction originelle pour vous dire que le réel est ce qui introduit le même, ou plus exactement le réel est ce qui revient toujours à la même place. - A n'est pas identique à A - nul moyen de faire apparaître le même, sinon du côté du réel. Autrement dit la coupure (...) ne peut savoir qu'elle s'est fermée, qu'elle ne repasse par elle-même que parce que le réel, en tant que distinct du signifiant, est le même. En d'autre termes, seul le réel la ferme. Une courbe fermée, c'est le réel révélé. - il faut que la coupure se recoupe - la coupure est un trait qui se recoupe -

1962/63 - L'angoisse - 27/02/63 - la loi morale est hétéronome ; c'est pourquoi j'insiste sur ceci qu'elle provient de ce que j'appelle le réel en tant qu'il intervient (...) en élidant le sujet, en déterminant de par son intervention même ce qu'on appelle le refoulement - non pas l'effacement des traces, mais le retour du signifiant à l'état de traces, l'abolition de ce passage de la trace au signifiant qui est constitué par (...) un soulignage, un barrage, une marque de la trace. - Le réel renvoyant le sujet à la trace, abolit le sujet aussi du même coup ; car il n'y a de sujet que par le signifiant, que par ce passage au signifiant - 13/03/63 - c'est bien du côté du réel (...) que nous avons à chercher de l'angoisse, ce qui ne trompe pas. Ce n'est pas à dire que le réel épuise la notion de ce que vise l'angoisse. - 20/03/63 - Ainsi, dit-on, le réel est toujours plein. - je n'ai jamais dit ça. Le réel fourmille de creux et on peut même y faire le vide. Ce que je dis, c'est qu'il ne lui manque rien, ce qui est tout différent.

1964 - Les quatre concepts… - 41 - Le réel supporte le fantasme, le fantasme protège le réel. - 58 - La place du réel, qui va du trauma au fantasme - en tant que le fantasme n'est jamais que l'écran qui dissimule quelque chose de tout à fait premier - 49 - Une pensée adéquate en tant que pensée (...) évite toujours - fût-ce pour se retrouver après en tout - la même chose. Le réel est ici ce qui revient toujours à la même place - à cette place où le sujet en tant qu'il cogite, où la res cogitans, ne le rencontre pas. - 53 - [La tuché d'Aristote] Nous l'avons traduit par la rencontre du réel. Le réel est au-delà de l'automaton [le réseau des signifiants], du retour, de la revenue, de l'insistance des signes à quoi nous nous voyons commandés par le principe du plaisir. Le réel est ce qui gît toujours derrière l'automaton - 54 - [Mais] La répétition est quelque chose qui, de sa véritable nature, est toujours voilé dans l'analyse, à cause de l'identification [abusive] de la répétition et du transfert dans la conceptualisation des analyses. - 55 - N'est-il pas remarquable que, à l'origine de l'expérience analytique, le réel se soit présenté sous la forme de ce qu'il y a en lui d'inassimilable - sous la forme du trauma - En effet, le trauma est conçu comme devant être tamponné par l'homéostase subjectivante qui oriente tout le fonctionnement défini par le principe du plaisir. - au sein même des processus primaires, nous voyons conservée l'insistance du trauma à se rappeler à nous - A cette exigence répondent ces points radicaux dans le réel que j'appelle rencontres, et qui nous font concevoir la réalité comme unterlegt, untertragen, ce qui en français se traduirait par le mot même, en sa superbe ambiguïté dans la langue française, de souffrance. La réalité est là en souffrance, là qui attend. - 67 - C'est pourquoi il est nécessaire de fonder d'abord cette répétition dans la schize même qui se produit dans le sujet à l'endroit de la rencontre. Cette schize constitue la dimension caractéristique de la découverte et de l'expérience analytique, qui nous fait appréhender le réel, dans son incidence dialectique, comme originellement malvenu. - Car après tout, pourquoi la scène primitive est-elle si traumatique ? Pourquoi est-elle trop tôt ou trop tard ? Pourquoi le sujet y prend-il trop de plaisir [obsession] (...) ou trop peu, comme chez l'hystérique ? Pourquoi n'éveille-t-elle pas tout de suite le sujet, s'il est vrai qu'il est si profondément libidinal ? - [La réponse] c'est ce qui apparaît de factice dans le rapport fondamental à la sexualité [= l'intervention de l'objet] -